JO 2030-2034 : Après sa visite à Lausanne, Salt Lake City va devoir choisir

En milieu de semaine, une délégation en provenance des États-Unis s’est rendue au siège du Comité International Olympique (CIO) à Lausanne (Suisse) pour promouvoir la candidature de Salt Lake City (Utah), sans pour autant annoncer l’échéance visée par la Ville Hôte des JO 2002.

La délégation du Comité Salt Lake City – Utah prend la pose devant les anneaux olympiques au siège du CIO, à Lausanne, Suisse, mercredi 15 juin 2022 (Crédits – Comité SLC – Utah)

Attendue depuis plusieurs mois, mais reportée en raison du contexte sanitaire, la visite d’une délégation de Salt Lake City a enfin pu avoir lieu au siège du CIO.

Une visite importante – voire déterminante – dans la course aux Jeux Olympiques et Paralympiques d’hiver de 2030 et ce, même si la cité américaine ne s’est pas encore formellement prononcée pour cette échéance ou, la suivante, à savoir celle de 2034.

Le déplacement des principaux leaders de la candidature – accompagnée par la star du ski alpin, Lindsey Vonn – visait sans doute davantage à promouvoir un projet qui, au cours des derniers mois, a été quelque peu bousculé par la concurrence asiatique incarnée par Sapporo (Japon) qui, après son retrait contraint pour les JO 2026, entend bien profiter de son héritage des Jeux de 1972 et de la dynamique offerte par la tenue des Jeux d’été de Tokyo 2020 qui, malgré un contexte singulier dû au Covid-19, ont été couronnés de succès.

Il n’empêche, la candidature de Salt Lake City va désormais devoir poursuivre des négociations serrées, tant avec le CIO et le Comité Olympique et Paralympique des États-Unis (USOPC), qu’avec le Comité d’Organisation des Jeux d’été de Los Angeles 2028.

Car si le CIO ne cache pas son envie de revenir au « Pays de l’Oncle Sam » pour célébrer à nouveau une édition des Jeux d’hiver, et alors que l’USOPC s’est choisie sa candidate dès 2018, les organisateurs de LA 2028 demeurent des interlocuteurs indispensables pour, à terme, pouvoir déterminer quelle échéance est susceptible d’être la plus appropriée pour assurer à chacun un juste équilibre sur le plan du marketing.

Vue de la vasque rénovée des Jeux d’hiver de Salt Lake City 2002 (Crédits – University of Utah)

De fait, et pour rappel, une candidature aux JO 2030 aurait pour faiblesse d’être dans une proximité organisationnelle et commerciale avec LA 2028.

Or, lorsque l’on sait que les organisateurs des Jeux d’été et l’USOPC ambitionnent de récolter – chacun – la bagatelle de 2,5 milliards de dollars de revenus issus des partenariats, il apparaît difficile d’imaginer que ce package financier puisse être pleinement réalisable avec la tenue d’une édition des Jeux d’hiver moins de deux ans après la clôture des Jeux d’été dans le même pays.

Dans le même temps cependant, une candidature aux JO 2030 aurait le mérite de repositionner les États-Unis parmi les grands acteurs du sport mondial, d’autant plus en tenant compte de l’organisation à venir de la Coupe du Monde de football en 2026, conjointement avec le Mexique et le Canada. En l’espace de quatre années, le territoire américain pourrait ainsi figurer sur la première place de l’échiquier sportif, avec les trois plus grands événements accueillis dans un intervalle inédit.

Une façon de venir rappeler à l’Asie – et notamment au géant chinois – le statut des États-Unis, alors que le continent le plus peuplé de la planète a raflé une bonne partie des compétitions mondiales de ces vingt dernières années. Pour preuve, outre la Coupe du Monde de football 2002 en Corée du Sud et au Japon, et celle de rugby en 2019 (Japon), l’Asie a également été l’écrin de plusieurs éditions des Jeux Olympiques de la Jeunesse (JOJ) de Singapour (2010) à Nanjing (Chine, 2014), en passant prochainement par Gangwon (Corée du Sud, 2024), sans compter bien sûr les Jeux, avec Pékin 2008, et surtout l’incroyable triplé de PyeongChang 2018, Tokyo 2020 et Pékin 2022. Le tout, en ne négligeant pas nombre de Championnats du Monde (natation, athlétisme, etc.) reçus sur le territoire continental.

Vue de l’Utah Olympic Oval et des montagnes alentours (Crédits – Utah Olympic Legacy Foundation)

Quoiqu’il en soit, la détermination de Salt Lake City est intacte. Il faut dire que la Ville Hôte des JO 2002 est prête à se lancer à l’assaut des anneaux olympiques depuis 2012, développant inlassablement ses arguments qui ne peuvent in fine que séduire : la qualité et l’utilisation maintenu des installations héritées des Jeux de 2002, le soutien populaire au zénith (87%), un appui institutionnel et politique transpartisan remarqué et un budget prévisionnel d’environ 2,2 milliards de dollars.

Aussi, comme l’a affirmé Fraser Bullock, Directeur Général du Comité SLC – Utah en marge de la visite à Lausanne cette semaine :

Ils savent que nous aimerions certainement organiser les Jeux le plus tôt possible.

Notre position est que nous organiserons des Jeux lorsque cela sera dans le meilleur intérêt du Mouvement Olympique et que toutes les pièces s’emboîteront du mieux que nous pourrons.

Nous essayons de faire en sorte que ces pièces s’emboîtent dès que possible.

L’été 2022 pourrait donc permettre de décanter une situation complexe où les enjeux – qui dépassent le seul cadre sportif – se chiffrent en milliards de dollars.

A l’automne, les choses pourraient alors s’accélérer, le CIO prévoyant d’établir un dialogue ciblé avec une ou des prétendantes à compter du mois de décembre 2022. A ce moment-là, dans les arcanes du pouvoir olympique, une décision formelle pour 2030 ou 2034 pourrait se dessiner.

Conscient que son destin n’est pas non plus entièrement entre ses mains, Salt Lake City avance dès lors en position de bonne élève, qui écoute les conseils et peaufine son projet.

Ainsi que l’a exposé Fraser Bullock en toute humilité :

Tout dépend du CIO. Nous nous contentons de baisser la tête, de faire notre meilleure proposition et de les laisser suivre leur processus.

L’une des choses que nous avons ressenties en particulier [au cours de la visite au CIO], est le sens du partenariat.

Nous voulons tous faire ce qu’il y a de mieux pour le Mouvement Olympique, et cela se traduit par le fait que nous voulons tous être ensemble dans ce voyage.

Vue de la Maison Olympique, siège du CIO à Lausanne, Suisse (Crédits – IOC / Greg Martin)

Face à deux projets techniquement solides, issus de villes déjà auréolées des anneaux olympiques – Salt Lake City et Sapporo -, le CIO pourrait aussi faire le choix, en mai 2023 lors de sa 140ème Session, de désigner l’hôte des Jeux de 2030 et l’hôte de l’édition de 2034.

Sur le modèle de la double attribution des JO 2024-2028, cela aurait le mérite de sécuriser les prochaines échéances olympiques hivernales, tout en s’assurant les services et le partenariat avec deux Villes Olympiques expérimentées et avec lesquelles le CIO pourra travailler dans une certaine sérénité après les années Covid qui ont marqué le modèle olympique et forcé ce dernier à évoluer.

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