JO 2030 : Face aux doutes, Sapporo va repenser sa stratégie

Fragilisée par les révélations de corruption entourant les Jeux de Tokyo 2020, et en parallèle de la remise à plat du processus décisionnel pour l’attribution des Jeux d’hiver de 2030 à l’initiative du Comité International Olympique (CIO), la candidature de Sapporo (Japon) a décidé de revoir sa stratégie pour repartir de l’avant.

Vue nocturne de Sapporo depuis l’Okurayama Ski Jump Stadium (Crédits – Sapporo Okurayama Ski Jump Stadium Official Website)

Longtemps en position de force pour obtenir l’organisation des Jeux d’hiver de 2030, la cité nippone de Sapporo doit désormais se recentrer pour espérer rester dans une course chaotique dont la Commission Exécutive du CIO a récemment choisi de bouleverser le déroulement.

Il faut dire que face à l’enquête judiciaire et aux révélations régulières des médias locaux concernant l’organisation des Jeux de Tokyo 2020, et alors que le Comité Olympique du Japon (JOC) a promis de revoir en profondeur le modèle de candidature et de promotion des grands événements sportifs, Sapporo se retrouve plongée dans une situation particulièrement délicate.

Secouée par les dépenses en hausse de Tokyo 2020 – indépendamment du contexte sanitaire lié à la crise du Covid-19 – l’opinion publique nippone porte ainsi un regard attentif sur le développement d’un nouveau projet olympique et paralympique. Or, le soutien exprimé jusqu’à présent à l’égard de Sapporo 2030 peine à décoller et ce, alors que la candidature promet une large réutilisation des sites hérités des Jeux de 1972 et s’engage par ailleurs dans la mise en place d’un concept vertueux tant sur l’économie que sur l’environnement.

Le rêve de revoir les anneaux olympiques pourrait encore s’éloigner pour Sapporo si les répercussions du scandale entourant Tokyo 2020 venaient à atteindre plus fortement l’appui populaire, faisant de facto vaciller bien davantage une candidature qui avait déjà dû se retirer du processus de sélection pour les Jeux de 2026. Certes, le contexte de l’époque était bien différent, le territoire de la Préfecture de Hokkaidō ayant alors été frappé par les conséquences d’un séisme en septembre 2018.

Consciente de la complexité de la situation, Seiko Hashimoto – qui fut Ministre des Jeux avant d’être nommée à la tête du Comité d’Organisation de Tokyo 2020 dans la dernière ligne droite des préparatifs – avait il y a peu exprimé ses craintes concernant le devenir de la candidature de Sapporo. Des craintes et des doutes par la suite exprimés par le Gouverneur de la Préfecture de Hokkaidō, Naomichi Suzuki.

Katsuhiro Akimoto, Maire de Sapporo, et Thomas Bach, Président du Comité International Olympique, le 07 août 2021 (Crédits – IOC / Greg Martin)

Aussi, afin de redonner un élan favorable au projet, la Ville de Sapporo et le JOC ont annoncé la suspension des activités de la candidature et leur volonté commune de créer les conditions adéquates à un soutien populaire renforcé.

En d’autres termes, la candidature freine pour l’heure son développement et mise massivement sur un regain d’intérêt des citoyens pour se présenter à nouveau face au CIO et face à la concurrence internationale.

Cité par l’agence de presse « Kyodo News », le Maire de Sapporo s’est voulu rassurant.

Comme l’a affirmé Katsuhiro Akimoto :

Nous n’avons pas abandonné.

Notre première priorité est de travailler pour dissiper les doutes et la méfiance du public plutôt que de nous précipiter aveuglément. Nous devons continuer sur la base du soutien populaire.

Concrètement, une nouvelle enquête sondagière devrait prochainement être réalisée en tenant compte non pas uniquement du périmètre territorial de Sapporo, mais du pays dans son ensemble.

En filigrane se dessine peut-être aussi la tenue à venir d’un référendum local, une option pourtant totalement exclue jusqu’à aujourd’hui par les autorités municipales.

En parallèle, le JOC entend mettre en œuvre sa réforme pour revoir la gouvernance des candidatures et des structures pilotant l’organisation des grands événements sportifs dans le pays, tout en examinant les rapports à convenir avec les prestataires extérieurs, et en particulier les agences de communication et autres partenaires commerciaux.

Vue du Sapporo Okurayama Ski Jump Stadium (Crédits – Sapporo Okurayama Ski Jump Stadium Official Website)

Cette suspension temporaire du projet nippon est évidemment rendue possible par la décision récente de la Commission Exécutive du CIO de remettre à plat le processus de désignation du futur hôte des JO 2030.

Confrontée à la situation de Sapporo, aux doutes de Vancouver (Canada), mais également à l’incertitude de Salt Lake City (Utah, Etats-Unis) concernant la meilleure option à choisir entre 2030 et 2034, l’institution olympique a ainsi préféré se donner du temps supplémentaire pour sélectionner son prochain partenaire des Jeux d’hiver.

Ce temps offre bien sûr une marge de manœuvre plus conséquente pour les territoires aujourd’hui en lice, et peut également permettre à d’autres prétendants de rejoindre en cours de route la phase de dialogue continu.

In fine, et bien qu’une phase de dialogue ciblé demeure envisagée dans le courant de l’année 2023, le CIO ne se prononcera pas sur le choix du futur hôte avant la Session prévue en marge des Jeux Olympiques de Paris à l’été 2024.

La suspension du projet intervient par ailleurs au moment où le Maire de Sapporo se projette sur les élections municipales du printemps 2023. Or, la candidature pour les Jeux de 2030 et les répercussions du scandale de Tokyo 2020 pourraient peser dans la balance et dans l’issue du scrutin.

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