JO 2030-2034 : La Catalogne veut revenir dans le jeu

Échaudée par l’échec de la candidature conjointe avec l’Aragon, la Catalogne n’a peut-être pas dit son dernier mot. Le Gouvernement catalan espère en effet être en capacité de pouvoir soumettre un nouveau projet pour l’accueil des Jeux d’hiver de 2030 ou, à défaut, de 2034.

Le Gouvernement catalan espère pouvoir convaincre le Comité Olympique Espagnol de soumettre la nouvelle candidature Pyrénées-Barcelone pour les Jeux d’hiver de 2030 ou, à défaut, ceux de 2034 (Crédits – Generalitat de Catalunya)

Alors que l’année 2022 constitue le trentième anniversaire des Jeux d’été de Barcelone 1992 qui demeurent, au niveau de l’organisation et des retombées multiples, un exemple en la matière, le Gouvernement catalan veut désormais présenter une candidature aux Jeux Olympiques et Paralympiques d’hiver.

Si les dernières tentatives en solo se sont systématiquement soldées par un retrait prématuré – 2022 surtout, puis 2026 – l’aventure conjointe menée avec l’Aragon voisine devait permettre de bâtir ce projet ambitieux reposant pour partie sur les sites des JO 1992.

Toutefois, les tensions territoriales et politiques entre les deux Communautés autonomes ont fini par hypothéquer toute possibilité de candidature devant le Comité International Olympique (CIO). Aussi, le Comité Olympique Espagnol (COE), par l’intermédiaire de son Président, Alejandro Blanco, avait par la suite formellement fermé la porte à une candidature pour 2030, estimant que les conditions n’étaient plus réunies pour assurer le succès du projet.

Avant cette annonce, survenue à la fin du mois de juin 2022, le Gouvernement catalan avait néanmoins émis l’idée d’élaborer un projet autour des Pyrénées catalanes et de Barcelone, sans l’apport de l’Aragon, comme pour tenter un sauvetage de la dernière chance pour la candidature.

La semaine passée, cette idée a à nouveau été mise sur la table.

Jeudi 28 juillet, Laura Vilagrà, Conseillère de la Présidence de Catalogne, a ainsi réuni la presse pour dévoiler les contours du nouveau projet dans un document d’une trentaine de pages, en précisant au passage que ce dernier avait préalablement été adressé au COE pour étude et validation.

Dans l’attente d’un retour espéré favorable de l’instance olympique espagnole, le Gouvernement régional a de fait présenté un concept repensé à l’échelle de la Catalogne, avec une relocalisation des épreuves initialement envisagées en Aragon.

Pour compenser l’absence de sites compétitifs sur le sol espagnol, l’hypothèse d’une alliance avec un Comité National Olympique européen est aussi de retour, la Bosnie-Herzégovine et sa capitale, Sarajevo, étant en pôle position pour intégrer le projet avec le bobsleigh, la luge et le skeleton, de même que le saut à ski. A défaut, une entente avec les sites français hérités de l’édition hivernale d’Albertville 1992 pourrait être recherchée. Cela pourrait en particulier inclure La Plagne pour la piste de bobsleigh, de luge et de skeleton, et Courchevel pour les tremplins de saut à ski.

Cartographie du concept de la nouvelle candidature olympique et paralympique hivernale de Pyrénées-Barcelone (Crédits – Generalitat de Catalunya)

Sur le plan strictement régional, Barcelone serait bien sûr la tête d’affiche de la candidature et d’une éventuelle organisation des premiers Jeux d’hiver en Espagne, avec notamment la mobilisation attendue du Stade Olympique de Montjuïc pour les Cérémonies d’ouverture et de clôture.

Fort de ses 14 000 places qui en font l’un des équipements multifonctionnels phares en Catalogne et en Espagne, le Palau Sant Jordi limitrophe serait quant à lui sollicité pour la tenue des épreuves de patinage artistique et de patinage sur piste courte (short-track).

La Fira de Barcelona – le Parc des Expositions de la cité catalane – serait pour sa part le théâtre temporaire des compétitions de patinage de vitesse. Des aménagements spécifiques seraient dès lors réalisés pour doter l’enceinte d’un anneau de vitesse d’une jauge de 6 000 spectateurs.

Concernant les autres épreuves de glace, le nouveau Palau Blaugrana (10 500 places) serait intégré au concept pour le tournoi de hockey-sur-glace, conjointement avec le Palau Olímpic de Badalona (10 800 places), troisième ville de Catalogne située dans la province de Barcelone.

Le curling serait enfin localisé du côté de Gavà, également en proche périphérie, avec une implantation au sein d’un futur Centre des Sports de glace qui comprendrait deux patinoires, dont l’une destinée à l’accueil de compétitions d’envergure avec une capacité de 3 000 spectateurs.

Pour ce qui concerne l’organisation des épreuves de neige, le Gouvernement catalan prévoit sans surprise de mobiliser les stations de La Molina et de Masella.

La première serait consacrée aux épreuves féminines de descente et de Super G qui auraient alors lieu sur la Pista Barcelona où des aménagements temporaires permettraient la mise en place de tribunes d’une capacité de 4 000 places, en plus d’une jauge debout de 10 000 spectateurs.

La Pista Olimpica serait pour sa part le cadre des épreuves de slalom et de slalom géant, et du fait de sa localisation, bénéficierait des mêmes équipements précités destinés aux spectateurs et autres officiels et médias.

La seconde station serait appelée à recevoir les épreuves masculines de descente et de Super G avec, pour le Pla de Masella, une capacité maximale de 18 000 places, dont 8 000 assises dans des gradins temporaires.

Les pistes pyrénéennes de Baqueira Beret, Espot et Boí Taüll sont elles-aussi envisagées dans la cartographie des sites dédiés aux sports de neige de l’éventuelle candidature catalane.

Le snowboard-cross et le ski-cross se partageraient ainsi le site de Blanhiblar à Baqueira Beret (14 000 places, dont 4 000 assises), tandis que les disciplines du Big Air, du halfpipe et du slopestyle seraient positionnées sur le site adjacent de Reina qui offrirait également une jauge maximale de 14 000 spectateurs. Enfin, le site de Beret-Cabana de Parros-Montgarri serait l’emplacement adéquat pour la tenue des épreuves de biathlon et de ski de fond. Pas moins de 18 000 spectateurs pourraient alors assister aux différentes sessions, avec notamment des tribunes assises de 6 000 places.

Du côté d’Espot, le site de La Pala serait susceptible d’accueillir le slalom géant parallèle de snowboard, avec ici une capacité globale de 8 000 spectateurs, dont 2 000 en tribunes temporaires.

La station de Boí Taüll, avec son site de Pla de Vaques, serait quant à elle sollicitée pour recevoir le ski alpinisme qui fera son apparition sur la scène olympique lors des prochains Jeux de Milan-Cortina 2026.

Présentation du nouveau projet de candidature Pyrénées-Barcelone par Laura Vilagrà, Conseillère à la Présidence de Catalogne, jeudi 28 juillet 2022 (Crédits – Generalitat de Catalunya)

Si, sur le papier, le projet catalan offre des possibilités intéressantes, l’échéance de 2030 semble néanmoins hors de portée et ce, au regard du timing restant jusqu’à l’engagement du CIO dans une phase de dialogue ciblée à partir de décembre 2022, phase préalable à la désignation officielle du futur hôte en mai 2023.

Les dernières semaines ont en effet montré une accélération du calendrier, avec les visites d’un trio d’experts de l’institution olympique à Sapporo (Japon), Salt Lake City (Utah, États-Unis) et Vancouver (Canada), toutes trois déjà bien présentes sur la ligne de départ pour 2030. Chacune a également avancé ses pions respectifs pour se démarquer de la concurrence, avec la présentation successive des projets et des budgets prévisionnels. A l’inverse, le retrait de la candidature pyrénéennes a porté un sérieux coup de frein à l’ambition espagnole.

A cela, il convient bien entendu d’ajouter le fait que le COE – autorité compétente pour soumettre un projet au CIO – n’a pas encore évalué la possibilité d’une candidature reposant sur Barcelone, les Pyrénées catalanes et au moins une option au-delà des frontières espagnoles.

Le Gouvernement catalan est en tout cas parfaitement conscient des difficultés actuelles. De fait, bien qu’il présente le projet pour 2030, il n’en demeure pas moins ouvert à la possibilité de décaler et d’adapter ledit projet pour l’édition hivernale suivante, à savoir celle de 2034.

Aussi, et comme pour donner du sens à une future candidature et projeter cette dernière sur un espace temps non-délimité, Laura Vilagrà n’a pas manqué de souligner le fait que :

C’est un projet Pyrénées-Barcelone porté par ces deux territoires très importants. Une ville qui est la marque la plus importante que nous ayons en Catalogne et des Pyrénées qui veulent se montrer au monde.

Les Maires demandent à ce que nous puissions continuer à promouvoir cette candidature, mais que nous réfléchissions aussi à l’héritage que peuvent laisser les Jeux. Des Jeux sans stratégie de développement n’ont en effet aucun sens.

La balle est à présent dans le camp du COE et de son Président, Alejandro Blanco.

Après avoir suivi les conseils du CIO de ne pas présenter de candidature de Madrid pour les Jeux d’été de 2036, celui-ci va devoir peser le pour et le contre d’un projet pour les Jeux d’hiver susceptible de faire oublier aux dirigeants olympiques les hésitations et le retrait précipité du précédent concept.

La tâche n’est pas aisée, mais l’engagement du Gouvernement catalan montre en tout cas l’attachement persistant au modèle olympique.

Reste aussi à convaincre le Gouvernement espagnol de suivre et d’accompagner un projet qui, malgré l’avis contraire de ses partisans, n’est plus d’envergure nationale. Sur ce point, les bisbilles régulières entre la Catalogne et le pouvoir central madrilène pourraient potentiellement jeter un froid sur une candidature, à moins qu’une entente cordiale dans l’intérêt des Jeux ne soit conclue.

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