Mercredi 13 septembre, après deux ans d’une campagne inédite, les membres électeurs du Comité International Olympique (CIO) désigneront officiellement Paris (France) comme Ville Hôte des Jeux d’été de 2024, et Los Angeles (États-Unis) comme Ville Organisatrice de l’édition 2028.
Cette double attribution – actée lors de la 130ème Session de l’instance olympique organisée en juillet à Lausanne (Suisse) – a quelque peu modifié la procédure habituellement consacrée pour les Villes Candidates.
Ainsi, le temps des présentations a été réduit, de même que la composition des délégations françaises et américaines et ce, à la demande du CIO. Entre 50 et 60 personnes devraient ainsi garnir les délégations, soit environ la moitié de ce qui avait initialement été envisagé.
Il faut dire qu’avec le changement de procédure, le CIO a idéalement pu remettre en avant les principes qui ont conduit, fin 2014, à l’adoption de l’Agenda 2020, une réforme ambitieuse prônant notamment la réduction des coûts pour la phase de candidature, et la valorisation de la durabilité pour la conception des projets.

A Lima, la délégation de Paris 2024 sera emmenée par la Maire de Paris, Anne Hidalgo, et par les co-Présidents du Comité de Candidature, Bernard Lapasset et Tony Estanguet.
La Ministre des Sports, Laura Flessel, et la Secrétaire d’État chargée des personnes handicapées, Sophie Cluzel, apporteront pour leur part la caution de l’État, tandis que Valérie Pécresse représentera la Région Île-de-France compte-tenu de ses fonctions de Présidente de l’exécutif francilien.
Patrick Ollier sera quant à lui présent au titre de Président de la Métropole du Grand Paris, une entité territoriale qui mise pleinement sur l’organisation des Jeux – et de l’Exposition Universelle de 2025 si la France en obtient l’attribution – pour affirmer son statut singulier entre la Ville et la Région.
Stéphane Troussel et Patrick Braouezec représenteront le Département de la Seine-Saint-Denis et Plaine Commune. Dominique Tian de son côté, représentera la Ville de Marseille du fait de ses fonctions de Premier Adjoint au Maire de la deuxième ville de France. Ce dernier côtoiera Jean-François Martins, Adjoint de la Maire de Paris en charge des sports et du tourisme.
L’unité politique – atout important tout au long de la campagne olympique – sera incarnée par la présence de trois anciens Ministre des Sports : Jean-François Lamour (sous la Présidence de Jacques Chirac), David Douillet (sous la Présidence de Nicolas Sarkozy) et Valérie Fourneyron (sous la Présidence de François Hollande).
En sa qualité de membre du CIO pour la France, Guy Drut sera aussi présent dans la capitale péruvienne, de même que Denis Masseglia avec sa casquette de Président du Comité National Olympique et Sportif Français (CNOSF), et Emmanuelle Assmann au titre de Présidente du Comité Paralympique et Sportif Français (CPSF).
D’autres personnalités de la candidature tricolore seront également du voyage : Étienne Thobois, Directeur Général de Paris 2024 ; Jean-Philippe Gatien, Directeur des Sports ; mais encore Marie Barsacq, Directrice de l’Héritage.
Outre les représentants institutionnels, la candidature de Paris 2024 sera par ailleurs incarnée par Tegla Loroupe, Chef de Mission de l’équipe des réfugiés lors des Jeux de Rio 2016 ; Alain Ducasse, célèbre Chef étoilé ; Laurent Petrynka, Président de la Fédération Internationale du Sport Scolaire ; et par nombre de sportifs français, Olympiens et Paralympiens, parmi lesquels Teddy Riner, Marie-José Pérec, Sarah Ourahmoune, Stéphane Diagana, David Smétanine, Cyril Moré, Brice Guyart, Arnaud Assoumani, Michaël Jérémiasz, Ryadh Sallem, Fabien Gilot, ou encore Gwladys Epangue.

Concernant le déroulement du séjour à Lima, candidatures et CIO répondront à un programme millimétré.
Comme ce fut le cas lors de la présentation des projets à Doha (Qatar) en novembre 2016, des sorties pédagogiques sont notamment annoncées en présence de sportifs ambassadeurs jusqu’à mercredi et le grand oral final.
Pour ce rendez-vous important – même si les enjeux d’un duel sont désormais caduques – le CIO a mis au point un échelonnement similaire à toutes les élections olympiques passées, à la nuance près que l’accord tripartite entraînera in fine une ratification à mains levées de la part des membres de l’institution.
Jusqu’à présent, chaque scrutin récent visant à désigner une Ville Hôte des Jeux – et sauf incident de dernière minute comme ce fut le cas pour la désignation de Pékin 2022 – s’était déroulé à bulletins secrets par le moyen de boitiers électroniques.
De fait, dès 09h00 mercredi – soit 16h00 en France – le Lima Convention Center ouvrira ses portes, avant que l’accord tripartite entre les deux Villes Candidates et le CIO ne soit présenté à 11h10 (18h10 heure française).
Ensuite, de 11h30 à 11h55 (18h30 à 18h55), la Commission d’évaluation pour les JO 2028 – dans la composition est identique à celle consacrée aux JO 2024 – fera mention de son Rapport. Ce dernier ne concernera bien sûr que Los Angeles, cette dernière étant seule à s’être positionnée sur l’échéance de 2028.
Puis dès 12h00 (19h00), Paris et Los Angeles se succéderont à la tribune : de 12h00 à 12h30 (19h00 à 19h30) pour la “Ville Lumière” et de 12h30 à 13h00 (19h30 à 20h00) pour la “Cité des Anges”.
Viendra dès lors l’heure du scrutin avec l’approbation de l’ordonnancement suivant : Paris 2024 et Los Angeles 2028.
Une fois la ratification consacrée, les deux Villes Hôtes et le CIO tiendront une conférence de presse conjointe (14h00 soit 21h00 heure française) afin de souligner les modalités d’organisation des Jeux et la réussite d’un accord “gagnant-gagnant-gagnant” pour reprendre la formule employée à Lausanne par le Président Thomas Bach.

Dans le même temps, des célébrations devraient se dérouler à Paris et à Los Angeles.
Ces dernières symboliseront la fin d’une campagne olympique sans précédent et tenteront de démontrer un enthousiasme populaire en l’absence du moindre suspens.
Les choses auraient peut-être été différentes à l’approche d’un scrutin classique dans lequel – scénario fiction – Paris aurait remporté le vote olympique face à ses concurrentes et ce, après trois échecs (1992, 2008 et 2012) au goût plus ou moins amer.
Mercredi soir, les anneaux olympiques seront en tout cas dévoilés sur l’Esplanade du Trocadéro, face à la Tour Eiffel. Cette présentation, orchestrée dès 20h05 par Bruno Julliard, Premier Adjoint à la Maire de Paris, précédera de quarante-huit heures un concert populaire sur le Parvis de l’Hôtel de Ville.
Retransmis en direct par la chaîne C8 et la radio RFM, ce concert (20h50) conclura la phase de célébration parisienne.
La capitale ne sera toutefois pas la seule ville française à célébrer l’attribution des JO 2024. En effet, Marseille sera aussi de la fête, le 13 septembre.
Dans un communiqué rendu public ce vendredi, la Cité Phocéenne – qui accueillera les épreuves de voile et une partie du tournoi de football – a annoncé l’illumination aux couleurs olympiques de divers sites emblématiques de la ville dès 20h30 : le Fort Saint-Jean, le Fort d’Entrecasteaux, le Palais du Pharo, le Palais de la Bourse et bien sûr le Stade Orange Vélodrome.
L’Hôtel de Ville – où le Maire, Jean-Claude Gaudin, et le Président de la Fédération Française de Voile, Nicolas Hénard, assisteront à l’annonce officielle du CIO – sera également pavoisé des couleurs olympiques, tandis qu’une barge sera installée dans le Vieux Port pour célébrer Paris 2024.

Après ces moments de célébration, les choses sérieuses débuteront – ou plutôt se poursuivront – réellement.
La constitution du Comité d’Organisation sera l’un des chantiers majeurs des six prochains mois.
Si la Ville de Paris sera un acteur-clé du dispositif, l’État devrait prendre son rôle à bras le corps avec l’investissement du Président de la République qui cherchera indéniablement à influer sur la composition du futur COJO, en y plaçant des personnalités de confiance ou en veillant aux divers choix stratégiques.
Mais les porteurs de la candidature – aux différents niveaux décisionnels – devront veiller à ne pas se disperser et à ne pas tirer un avantage excessif de l’attribution des Jeux.
Si le puzzle de composition du Comité organisateur sera un élément à scruter au cours des mois à venir, le rôle et les propos des différents acteurs institutionnels sur l’après-13 septembre seront aussi à étudier.
Ainsi, une guerre des égos n’est pas à écarter dans l’optique de la structuration du COJO et du lancement des premiers chantiers.
Néanmoins, une telle entreprise renverrait immanquablement une image désastreuse auprès de l’opinion publique désireuse, sinon de soutenir l’accueil des Jeux, d’au moins en percevoir les fruits rapidement.

La mise en œuvre pratique du projet permettra à cet égard de prendre conscience de l’ampleur de la tâche à accomplir d’ici l’été 2024 et même avant.
Certes, le projet de Paris 2024 ne mentionne que deux sites sportifs à construire (Centre Aquatique et Bercy Arena II) – dont l’un indépendamment des Jeux (Bercy Arena II) – mais les aménagements du Village des Athlètes auront toute leur importance dans le cadre des préparatifs organisationnels, notamment sur le plan budgétaire.
Planifié sur le périmètre territorial de Pleyel / L’Île-Saint-Denis, le Village Olympique et Paralympique se veut une vitrine de ce que Paris 2024 entend laisser en héritage à la région francilienne, sur le plan du logement, mais aussi en matière de valorisation de l’existant et de préservation de l’environnement.
Pour parvenir à l’édification de ce futur écoquartier de 51 hectares, des terrassements et travaux de dépollution du site seront certainement à l’ordre du jour pour le Comité d’Organisation, la SOLIDEO et les acteurs privés qui s’engageront dans la livraison du projet, sans compter les questions liées à l’enfouissement des lignes électriques à haute-tension et les aménagements relatifs à l’éloignement sonore des axes autoroutiers.
Situé à deux kilomètres du Stade de France et du futur Centre Aquatique de Saint-Denis, l’équipement – qui utilisera notamment la Cité du Cinéma pour abriter le restaurant des athlètes – a été l’un des arguments forts de la candidature de Paris 2024.
Il faut dire qu’avec l’ambition affichée de générer après les Jeux – idéalement et sauf changement technique – quelques 2 200 logements familiaux, 900 logements étudiants, ainsi que 2 hôtels et pas moins de 10 hectares d’espaces verts, Paris 2024 a clairement souhaité démontrer l’importance accordée par la candidature à la régénération urbaine du département de la Seine-Saint-Denis.
L’aménagement d’un Village des Médias dans le “cluster” de Dugny / Le Bourget répond également à ce souhait, un souhait qui s’exprime d’ailleurs en parallèle et en symbiose avec les travaux d’aménagement du futur Grand Paris Express et des lignes nouvelles du métro.
Quoiqu’il en soit, la volonté – ou devrait-on dire, la promesse – de la candidature d’appuyer la renaissance de la Seine-Saint-Denis ne pourra prendre forme uniquement sur des actions urbaines et d’embellissement du territoire.

La problématique éducative et l’accès de la population – en particulier des plus jeunes – à la pratique sportive et aux structures sportives rénovées (Piscine de Marville par exemple) ou nouvellement construites (Centre Aquatique de Saint-Denis) seront là-encore des points cruciaux du dispositif olympique et paralympique.
A l’instar des Jeux de Londres 2012 avec ce qui est devenu un écoquartier emblématique de la renaissance de l’East End, le projet de Village de Paris 2024 sera donc un axe déterminant du dispositif olympique et paralympique.
Dès lors, et en conséquence, toute problématique (retard, surcoût éventuel, etc…) ayant pour objet ledit Village pourra avoir des répercussions sur l’ensemble du dispositif et une incidence sur la perception populaire des Jeux.
Outre le périmètre de la seule Seine-Saint-Denis et au-delà de la problématique budgétaire – qui concernera particulièrement le volet lié à la sécurité de l’événement -, la promesse olympique et paralympique sera scrupuleusement analysée dans sa capacité à répondre aux enjeux de l’accessibilité des sites et des transports pour les personnes à mobilité réduite.
Faute d’un engagement régulier, franc et massif des pouvoirs publics sur cette question depuis de nombreuses années, le projet de Paris 2024 a l’ambition d’incarner un nouveau regard sur le handicap.
La pleine intégration du Comité Paralympique Français et des acteurs associatifs locaux et nationaux pourra peut-être faciliter une prise de conscience collective et in fine, une vision à long terme pour le handicap sous toutes ses formes et dans ses spécificités (logement, transport, travail, éducation, santé, etc…).

Croire qu’une candidature aux Jeux et l’organisation de ces derniers puissent répondre à toutes les attentes serait cependant utopique. Au lendemain du 13 septembre, les discours parfois lyriques entendus au cours des deux dernières années devront laisser place à la gravité des actions à engager sur le terrain.
Il en va de la crédibilité d’un projet dont les instigateurs n’ont eu de cesse de vanter les mérites et les aspects vertueux.
Les sept prochaines années seront de ce point de vue intéressantes à étudier, d’autant plus que d’autres enjeux viendront ou devront inévitablement se greffer, au premier rang desquels la refonte du modèle de gouvernance du sport en France.
Cela donnera lieu à de prochains développements au cours des années à venir.
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