Alors que le Comité d’Organisation des Jeux (COJO) de Paris 2024 tablait jusqu’à présent sur une jauge de 600 000 spectateurs le long de la Seine au soir de la Cérémonie d’ouverture, les contraintes de sécurité et la logistique complexe d’un tel événement devraient néanmoins le conduire à revoir à la baisse ses ambitions.

Le 26 juillet 2024, Paris accueillera le monde du sport dans un cadre exceptionnel afin de célébrer l’ouverture des Jeux Olympiques d’été, les troisièmes de l’histoire à se tenir dans la capitale française et ses alentours après les éditions de 1900 et de 1924.
Pour les organisateurs, le choix des berges de Seine permet d’envisager une scénographie inédite pour un événement dont les images vont faire le tour de la planète, avec également un afflux historique de spectateurs.
Aussi, conscient du potentiel offert par une Cérémonie d’ouverture au cœur de la “Ville Lumière”, le COJO a sans doute vu les choses de manière quelque peu disproportionnée, en particulier à l’aune des contraintes portant sur une telle manifestation.
Si de premières projections dépassaient ainsi le million de spectateurs attendus, l’officialisation du cadre de la Cérémonie avait finalement donné lieu à une estimation ramenée à 600 000 spectateurs, dans une configuration quais hauts et quais bas sur un linéaire de plus de 6 kilomètres entre le Pont d’Austerlitz et le Pont d’Iéna.
Déjà, cette jauge représentait un défi sans commune mesure, aussi bien pour les organisateurs parisiens que pour le Comité International Olympique (CIO) et les diffuseurs de l’événement mondial.
Traditionnellement en effet, les Villes Hôtes des Jeux choisissent un stade comme théâtre plus à même de répondre à la nécessité de créer un spectacle vivant et dynamique destiné à valoriser la culture et le savoir-faire local, tout en accueillant près de 10 500 athlètes sur une scène centrale. Une première incursion à l’extérieur avait néanmoins été opérée par Buenos Aires (Argentine) lors de la Cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques de la Jeunesse (JOJ) en 2018. Mais l’événement avait alors été pensé pour capter l’attention in situ de 200 000 à 300 000 spectateurs. Bien moins donc que les projections aujourd’hui formulées par Paris 2024, avec aussi un espace scénique en zone urbaine moins conséquent.
Même Los Angeles (Californie, États-Unis) n’a pas envisagé – tout du moins à ce stade – la tenue d’une Cérémonie d’ouverture à plus d’un demi-million de spectateurs réunis en cœur de ville.
Si l’on se penche sur la candidature de la cité américaine, le dispositif prévoit ainsi l’organisation de l’événement sur deux stades emblématiques, à savoir le Memorial Coliseum – hôte des JO 1932 et 1984 – et le nouveau SoFi Stadium, avec entre les deux enceintes, une déambulation urbaine. En attendant une présentation plus détaillée qui interviendra dans les mois à venir, le tableau soumis jusqu’à présent pourrait permettre l’installation en tribunes de quelques 180 000 spectateurs. Là-encore, bien loin des 600 000 spectateurs espérés par Paris 2024 et ce, même si on se laisse aller à des projections complémentaires sur la ville.

Au regard de cet historique, et en tenant compte également du fiasco de la finale de la Ligue des Champions de football au Stade de France (Saint-Denis), plus tôt cette année, les organisateurs parisiens vont certainement devoir réviser leurs plans, en concertation avec les autorités compétentes, que sont en particulier le Ministère de l’Intérieur et la Préfecture de Police de Paris.
Récemment, le Président de la République en personne a d’ailleurs rappelé que la sécurité de la Cérémonie d’ouverture – et plus globalement des Jeux – relevait des pouvoirs des deux structures précitées, respectivement pilotées par Gérald Darmanin et, depuis peu, par Laurent Nuñez.
Les deux hommes se connaissent bien, le premier étant locataire de la Place Beauvau depuis 2020, le second ayant quant à lui occupé les fonctions de Coordonnateur nationale du renseignement et de la lutte contre le terrorisme (2020-2022), après avoir été Secrétaire d’État auprès du précédent Ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner (2018-2020).
Les discussions à venir auront en tout cas pour principaux objectifs d’affiner la jauge qui pourrait être abaissée à 400 000 spectateurs – voire même moins – tout en examinant les possibilités d’aménagement des quais de Seine, les organisateurs envisageant pour l’heure un accès gratuit sur la partie haute et un accès payant sur la partie basse.
La réduction inévitable de la jauge devrait par ailleurs s’accompagner d’un examen approfondi des conditions d’accueil des athlètes sur les dizaines de barges qui seront installées sur le fleuve parisien en contrebas de la Bibliothèque Nationale François Mitterrand.
Là-encore, la question de la sécurité sera au centre de l’attention, aussi bien de la part des autorités publiques que des Comités Nationaux Olympiques (CNO) invités aux Jeux de Paris 2024. Il faut s’attendre en effet à ce que ces derniers veillent à ce que leurs athlètes puissent embarquer dans des conditions optimales de sécurité, de leur point d’entrée, jusqu’à leur arrivée devant le Trocadéro. Les plus importantes délégations, les États-Unis et la Chine en tête, seront à n’en pas douter particulièrement vigilantes.

A l’image des dernières revues de projet qui ont bouleversé en profondeur la cartographie des sites, la question de la Cérémonie d’ouverture démontre ici ce qui pourrait s’apparenter à un certain empressement – certains parleront d’amateurisme – de Paris 2024 à avoir voulu présenter un dispositif non-encore parfaitement délimité avec l’ensemble des parties prenantes.
Or, l’ouverture des Jeux représente un défi et une vitrine capitale pour les organisateurs, l’audience cumulée de la soirée inaugurale se chiffrant systématiquement en milliards de téléspectateurs.
Le moindre faux-pas n’est donc pas toléré, d’autant plus lorsque l’on envisage de “casser les codes” pour reprendre une expression de Tony Estanguet, Président du COJO.
Pour que la fête soit au rendez-vous, et afin de limiter les risques sur la sécurité, sur l’accessibilité ou encore sur les moyens techniques à disposer de part et d’autre de la Seine, et bien sur le coût prévisionnel de l’événement, mieux vaut alors revoir le calibrage du projet, ce qui n’enlèvera en rien les images spectaculaires promises par le déroulement de la Cérémonie d’ouverture en plein cœur de Paris.
Une pensée