JO 2030 : La France avance un concept de quatre clusters régionaux au fort accent politique

Ce mardi 07 novembre 2023, les porteurs de la candidature olympique et paralympique française ont levé le voile sur le concept du projet, entre vision pour les Jeux et répartition des sites à l’échelle des deux régions alpines de l’Hexagone.

Conférence de presse de présentation de la candidatures des Alpes françaises à l’organisation des Jeux d’hiver de 2030, mardi 07 novembre 2023 (Crédits – CNOSF / KMSP)

Depuis l’été 2023, les Alpes françaises travaillent autour d’une candidature unissant les Régions Auvergne-Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte-d’Azur dans l’espoir d’assurer un retour des Jeux d’hiver en France, plus de 30 ans après l’édition d’Albertville 1992.

Au cours des cinq mois passés, les acteurs de cette candidature se sont ainsi réunis à plusieurs reprises pour affiner un concept également discuté avec les équipes du Comité International Olympique (CIO) et ce, conformément aux nouvelles règles fixées par l’institution dans le cadre du dialogue avec les prétendantes aux Jeux.

Aussi, et alors que la Commission de Futur Hôte du CIO doit prochainement auditionner la candidature tricolore, la présentation des grands axes du projet s’est déroulée ce mardi 07 novembre 2023, autour de David Lappartient, Président du Comité National Olympique et Sportif Français (CNOSF) et membre du CIO, Marie-Amélie Le Fur, Présidente du Comité Paralympique et Sportif Français (CPSF), Laurent Wauquiez, Président de la Région Auvergne-Rhône-Alpes et Renaud Muselier, Président de la Région Provence-Alpes-Côte-d’Azur, ce dernier par le biais d’une connexion en visioconférence.

Si l’association des deux régions alpines avait été annoncée jusqu’alors, encore fallait-il identifier la localisation prévisionnelle des compétitions avec le souci – territorial mais plus encore politique – d’assurer une juste répartition.

Cartographie de la candidature des Alpes françaises à l’organisation des Jeux d’hiver de 2030 (Crédits – CNOSF)

En ce sens, quatre clusters ont été étudiés, sous réserve des observations qui seront formulées par le CIO quant à la viabilité et la faisabilité d’un projet reposant sur un périmètre élargi.

Concrètement, en Auvergne-Rhône-Alpes, le pôle Haute-Savoie serait lauréat des épreuves de biathlon et de ski de fond, avec les sites respectifs du Grand Bornand et de La Clusaz.

Plus au sud, le pôle Savoie serait quant à lui hôte des compétitions de bobsleigh, de luge, de skeleton, sur le site historique de La Plagne, mais aussi des épreuves de ski alpin entre Méribel, Courchevel et Val d’Isère (slaloms), sans oublier aussi les épreuves de saut à ski et de combiné nordique.

Du côté de l’axe régional en Provence-Alpes-Côte-d’Azur, le pôle Briançonnais verrait l’accueil des compétitions de snowboard (slopestyle, big air / slalom, halfpipe) et de ski freestyle (slopestyle, big air / halfpipe, ski de bosses). Dans le cas où le ski alpinisme – qui fera son entrée aux Jeux de Milan-Cortina 2026 comme sport additionnel – serait maintenu au programme, les Écrins constitueraient le secteur adéquat pour la tenue des épreuves.

Enfin, le pôle Nice-Côte-d’Azur est proposé pour recevoir la grande majorité des épreuves de glace, à savoir le curling, le patinage artistique, le patinage de vitesse sur piste courte (short-track), de même que les tournois masculin et féminin de hockey-sur-glace. Le ski cross et le snowboard cross sont également projetés sur ce pôle.

Bien sûr, face à un éclatement du concept autour de quatre clusters régionaux distincts les uns des autres, quatre Villages des Athlètes – dans une configuration temporaire ou pérenne – seraient planifiés pour répondre aux besoins des compétiteurs et de leurs accompagnateurs.

Concernant la localisation des Cérémonies d’ouverture et de clôture, la réflexion demeure, même si le Président de la Région Auvergne-Rhône-Alpes, Laurent Wauquiez, a fait savoir que l’ouverture se tiendrait au nord, dans un schéma possiblement novateur où non pas un mais plusieurs lieux pourraient être mobilisés afin d’offrir des tableaux de célébration comme un écho aux Jeux d’hiver passés qui ont été orchestrés en France, entre Chamonix (1924), Grenoble (1968) et Albertville (1992).

La clôture est en revanche annoncée du côté de Nice, la ville méditerranéenne offrant la possibilité de recevoir l’événement au sein de l’Allianz Riviera.

Du fait de sa position géographique et de sa desserte par les transports – notamment par voie aérienne – Nice est en outre le lieu envisagé pour abriter le Centre International de Radio-Télévision (CIRTV ou IBC) et le Centre Principal de Presse (CPP ou MPC).

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Deux points majeurs restent néanmoins à éclaircir concernant la cartographie des sites reposant sur 95% de sites existants, dont certains directement hérités des Jeux d’Albertville 1992.

Les porteurs de la candidature envisagent ainsi de bâtir une nouvelle patinoire à Nice selon des modalités à définir quant au coût, à la jauge et à la réutilisation post-JO, le CIO étant particulièrement attentif à la viabilité de l’héritage comme il a d’ailleurs pu le démontrer la semaine dernière vis-à-vis des organisateurs de Milan-Cortina 2026.

Mais surtout, la candidature doit encore déterminer le point de chute approprié pour la tenue des épreuves de patinage de vitesse, l’option d’un site temporaire étant étudiée, tout comme celle visant à associer un pays européen disposant déjà d’une infrastructure opérationnelle en la matière.

D’autres problématiques se posent en outre pour les partisans d’un projet dont le budget d’organisation est pour l’heure évoqué à plus ou moins 1,5 milliard d’euros.

L’omniprésence des acteurs politiques interroge légitimement, alors que Paris 2024 avait réussi le tour de force de mettre en avant les sportifs afin de casser la spirale des défaites entourant les précédentes candidatures françaises, en particulier avec le souvenir désastreux de la gestion du projet de Paris 2012.

Certes, la sélection de l’Hôte des Jeux a évolué au cours des dernières années, avec une volonté du CIO de revoir du sol au plafond les conditions d’attribution des Jeux en misant grandement sur le dialogue avec les parties prenantes pour confier l’organisation de l’événement au moment le plus opportun dans l’intérêt de tous.

Il n’empêche, certains fondamentaux apparaissent essentiels à préserver.

La présence des athlètes au sein des candidatures en fait partie intégrante, d’autant plus pour un pays où l’un des atouts n’est autre que le palmarès de ses sportifs sur la scène des Jeux.

Or, hormis les interventions – à distance – de Marie Bochet, octuple Championne paralympique de para-ski alpin, et de Martin Fourcade, quintuple Champion olympique de biathlon et membre du CIO, la participation des athlètes français s’est limitée ce jour à de courts témoignages diffusés dans un clip vidéo en tout début de conférence de presse.

Par la suite, les Présidents de deux Régions, Laurent Wauquiez et Renaud Muselier, ont quelque peu tiré la couverture sur eux, comme ils le font depuis les prémices du projet, justifiant ce positionnement par la sollicitation et l’implication des autres acteurs territoriaux pour sanctuariser un projet mêlant in fine plusieurs Départements et Régions.

De fait, tout en mentionnant le soutien de 400 sportifs tricolores, dont 80 médaillés aux Jeux, le discours porté aujourd’hui avait avant tout un fort accent politique, les Jeux ayant été présentés comme un vecteur pour la transformation des territoires vers un modèle écoresponsable et pour le désenclavement des vallées.

Les deux leaders régionaux – qui ont fait preuve de marques d’estime l’un envers l’autre – ont d’ailleurs multiplié les références au fait qu’ils étaient à l’origine de la réflexion de la candidature tricolore.

Sur ce point, force est de constater que des trois candidatures positionnées sur 2030, celle de la France apparaît nettement comme la plus politique, le projet suédois étant ouvertement piloté avec justesse par le Comité National Olympique (SOK) depuis la mise en place d’une étude préliminaire, tout comme le projet helvète porté par Swiss Olympic, là-encore depuis la décision d’étudier les conditions d’une candidature.

Vue de la Maison Olympique, siège du CIO à Lausanne, Suisse (Crédits – IOC / Greg Martin)

Désormais, la candidature tricolore va avancer davantage dans l’échange avec le CIO.

Le 21 novembre prochain, une audition à distance sera en particulier organisé entre les porteurs de la candidature qui sont intervenus ce mardi – avec le concours complémentaire de la Ministre des Sports et des Jeux Olympiques et Paralympiques, Amélie Oudéa-Castéra pour démontrer le plein soutien des services de l’État – et les membres de la Commission de Futur Hôte.

Cette dernière formulera en suivant une recommandation à l’égard de la Commission Exécutive après avoir entendu l’ensemble des candidatures – outre la France, la Suède et la Suisse pour 2030 et les États-Unis avec Salt Lake City (Utah) pour 2034 – afin de permettre l’enclenchement de la phase de dialogue ciblé.

La décision du passage dans cette phase capitale interviendra dans le cadre de la réunion de la Commission Exécutive (29 novembre au 1er décembre 2023 inclus).

Si d’aventure la candidature des Alpes françaises venait à être sélectionnée, le CNOSF et les parties prenantes au projet auraient à remplir un questionnaire détaillé sur le concept proposé. Pas moins de 23 dossiers de garanties devraient en parallèle être adressés au CIO, que ce soit en matière de mobilisation des sites, de financement, d’hébergement, de sécurité, de soutien des pouvoirs publics, sans oublier aussi le volet stratégique du marketing.

La phase de dialogue ciblé préfigurera en tout cas l’identité des Futurs Hôtes des Jeux, la Commission Exécutive étant par la suite amenée à soumettre, conformément au principe de double attribution 2030-2034, un choix au vote de la Session du CIO qui se réunira en 2024, à Paris en marge des Jeux, ou dans une ville issue d’un pays n’étant pas candidat dans l’optique où le projet français serait pressenti.

Une chose est sûre : les Alpes françaises sont candidates pour 2030 et seulement pour 2030, l’idée d’envisager un report sur 2038 en cas de non-sélection pour le dialogue ciblé n’étant pas à l’ordre du jour, ni du Mouvement olympique et paralympique français, ni des acteurs politiques engagés sur le dossier des Jeux.

Une pensée

  1. Je ne vois pas trop l’intérêt de Nice comme pôle « glace » par rapport à Lyon qui a les atouts suivants:
    – beaucoup plus proche des pôles « neige »
    – beaucoup mieux desservi par train (plutôt que par avion)
    – possède déjà la fameuse patinoire (LDLC arena) que Nice doit construire

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