A Almaty, du rêve olympique au chaos

Le 31 juillet 2015, les membres du Comité International Olympique (CIO) préférèrent Pékin (Chine) à Almaty (Kazakhstan) pour assurer l’organisation des Jeux d’hiver de 2022. Sept ans plus tard, la principale ville kazakh est au cœur d’une contestation populaire inédite contre la hausse des prix de l’énergie, mais aussi d’une répression sanglante de la part du pouvoir central.

Présentation de la candidature d’Almaty 2022 lors de la 128ème Session du CIO, le 31 juillet 2015 à Kuala Lumpur, Malaisie (Crédits – IOC / Ubald Rutar)

Au moment de présenter sa candidature à l’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques d’hiver de 2022, Almaty se définissait ainsi :

Ville des pommes, domaine de la panthère des neiges et peut-être première cité eurasienne à accueillir les Jeux.

A cette époque entre 2014 et 2015, l’ancienne capitale du Kazakhstan ambitionnait de recevoir le plus grand événement sportif hivernal au monde, avec la promesse de Jeux sobres sur le plan économique, via en particulier un budget de fonctionnement de 1,75 milliard de dollars et un budget hors-Comité d’organisation de 2,5 milliards, et une majorité de sites existants ou tout du moins opérationnels à compter de 2017, année de réception de l’Universiade d’hiver.

Pour Almaty, ville entourée de montagnes enneigées, le retrait successif des candidatures européennes comme Oslo (Norvège), Cracovie (Pologne) ou Munich (Allemagne) devait en outre être synonyme d’un espoir de consécration face à Pékin, ville dont l’expérience en matière de sports d’hiver restait à établir.

In fine, les membres du CIO préférèrent accorder leur confiance à la favorite du moment, Ville Hôte des Jeux d’été de 2008, plutôt que de tenter l’aventure d’un pays et d’une ville n’ayant jamais accueilli l’événement planétaire. Ainsi, le 31 juillet 2015, la capitale chinoise rafla la mise avec 44 voix contre 40 suffrages pour sa rivale kazakh.

Sept ans plus tard, alors que Pékin s’apprête à ouvrir les Jeux d’hiver le 04 février prochain, Almaty est pour sa part confrontée à une crise sociale d’une ampleur inédite et à une répression politique majeure.

Depuis plusieurs semaines en effet, la population kazakh proteste massivement contre l’inflation du coût de la vie et l’augmentation des prix de l’énergie, en particulier du gaz. De nombreuses manifestations se sont ainsi déroulées dans les principales villes du pays, parmi lesquelles l’ancienne capitale et toujours plus grande cité du Kazakhstan, Almaty.

Mais cette contestation populaire sans précédent dans l’histoire de la République érigée en 1991 et dirigée d’une main de fer par Noursoultan Nazarbaïev jusqu’en 2019, est parallèlement réprimée avec force par le pouvoir en place. Un pouvoir incarné par le Président en exercice, Kassym-Jomart Tokaïev bien sûr, et par le prédécesseur précité de ce dernier qui, jusqu’au 05 janvier 2022, occupait les fonctions stratégiques de Chef du Conseil de Sécurité.

Aussi, dans sa volonté d’asseoir son autorité sur le pays – et peut-être aussi pour se démarquer enfin de son encombrant mentor – le Président n’a pas hésité à ordonner aux militaires de “tirer pour tuer” sur la foule des manifestants, et à procéder à l’arrestation de plus de 5 000 personnes, dont certains anciens hauts responsables du régime de Nazarbaïev.

Karim Massimov, Premier Ministre du Kazakhstan et Président du Comité de Candidature d’Almaty 2022, et Thomas Bach, Président du Comité International Olympique, lors de la 128ème Session du CIO, le 31 juillet 2015 à Kuala Lumpur, Malaisie (Crédits – IOC / Ian Jones)

Ainsi, l’ancien Premier Ministre, Karim Massimov, a été incarcéré suite à des soupçons de trahison.

Ce dernier a, durant plusieurs années, occupé les fonctions de Chef du gouvernement. A deux reprises, il fut en effet l’un des bras droits de Noursoultan Nazarbaïev, étant son Premier Ministre une première fois entre 2007 et 2012, puis une seconde fois entre 2014 et 2016, année où il prit les commandes du Comité de Sécurité nationale, équivalent des services de renseignements.

Karim Massimov fut aussi l’un des artisans de l’ambition olympique et paralympique du Kazakhstan, au travers de ses fonctions de Président du Comité de Candidature d’Almaty 2022.

A ce poste, il dirigea notamment les ultimes présentations devant le CIO, que ce soit à Lausanne (Suisse) en juin 2015, ou à Kuala Lumpur (Malaisie) un mois plus tard, lors de la 128ème Session appelée à désigner l’Hôte des Jeux.

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