Paris 2024 : Vers une rénovation a minima pour le Stade de France

Plus grande enceinte sportive du pays, le Stade de France – qui célèbre cette année son vingtième anniversaire – s’apprête à entrer dans une nouvelle ère, avec l’accueil à venir des Jeux Olympiques et Paralympiques en 2024.

Avant cela, l’iconique bâtiment de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) recevra plusieurs manifestations sportives et culturelles d’importance, dont des matchs-clés de la Coupe du Monde de Rugby en 2023.

Vue du Stade de France à l’occasion de la visite de la Commission d’évaluation du CIO, en mai 2017 (Crédits – Sport & Société)

Pour assurer la bonne tenue de ces deux événements-phares, le Stade de France devrait connaître une phase de rénovation et de modernisation de ses équipements, comme cela fut d’ailleurs exposé dans une précédente publication plus tôt cet automne.

Ce chantier permettra alors un accueil du public et des compétiteurs dans des conditions optimales et adaptées à une structure du XXIème siècle. Mais à cinq ans du premier rendez-vous sportif et à six ans du second, les organisateurs des deux compétitions et les pouvoirs publics se doivent néanmoins de statuer sur une programmation des travaux parfaitement calibrée et au coût maîtrisé.

Cet impératif calendaire et financier a en tout cas fait l’objet d’un récent référé adressé par le Premier Président de la Cour des Comptes au Premier Ministre.

En date du 17 septembre 2018, Didier Migaud a ainsi dressé un constat et formulé des recommandations concernant le contrat de concession et le devenir du Stade de France. Si ledit contrat sera au cœur d’une publication ultérieure ici-même, il paraissait pertinent de se concentrer aujourd’hui sur la nature et l’importance des aménagements envisagés d’ici 2024.

Dans le référé de six pages et comme une mise en perspective des aménagements consentis et à venir, le Premier Président de la Cour rappelle en particulier le montant des dépenses liées à la construction et à la gestion de l’enceinte saint-dionysienne, soit 950 millions d’euros entre 1995 et aujourd’hui, avec une contribution de l’État à hauteur de 303 millions d’euros. Au regard de ces deux données chiffrées, il n’est pas étonnant de relever l’extrême prudence avec laquelle le Gouvernement souhaite avancer sur ce double dossier, comprenant donc à la fois les aménagements pré-2024 et la gestion du stade post-2025.

Vue des tribunes et de la toiture du Stade de France (Crédits – Sport & Société)

Dans la perspective des Jeux, le Comité de Candidature de Paris 2024 avait estimé un chantier de rénovation de 79,8 millions de dollars. Ce chantier, bien supérieur aux travaux envisagés dans le cadre des deux précédentes candidatures françaises – 1,9 million pour Paris 2008 et 3,6 millions pour Paris 2012 – devrait constituer une enveloppe budgétaire globale dans laquelle chacune des parties prenantes apportera sa contribution.

Aussi, dans un souci de maintien des finances publiques, l’État a acté, avec la Région Île-de-France, de mettre en place un investissement de 50 millions d’euros au maximum pour assurer la modernisation du Stade de France.

Il faut dire que l’enceinte francilienne est d’ores et déjà en capacité de recevoir un événement de la dimension des Jeux. Ce point en fait même une spécificité, puisque toutes les Villes Hôtes de ces trente dernières années ont mené des aménagements profonds, allant d’une rénovation majeure à une pleine construction.

Pour 1992, Barcelone (Espagne) avait consenti à reconstruire une enceinte située sur la colline de Montjuic et aujourd’hui connue sous le nom de Stade Lluis Companys. Atlanta (Géorgie, États-Unis) avait quant à elle procédé à la construction du Centennial Olympic Stadium en vue des Jeux de 1996, tout comme Sydney (Australie) avec son Stadium Australia avant les JO 2000. Par la suite, les Villes Hôtes des Jeux de 2012 (Londres, Royaume-Uni) et de 2020 (Tokyo, Japon) ont toutes deux engagé l’aménagement d’une enceinte de 80 000 places.

Paris se trouve donc dans une situation unique, car même si les Villes Hôtes des Jeux de 2004 (Athènes, Grèce) et de 2016 (Rio de Janeiro, Brésil) disposaient déjà d’un “Stade Olympique”, les rénovations qui furent menées autour des deux enceintes se sont toutefois chiffrées à plusieurs centaines de millions d’euros.

En faisant le choix du Stade de France existant, Paris 2024 a indéniablement répondu à une problématique d’économies et de durabilité. Ce choix, accentué par la décision de l’État d’apporter un investissement maximum de 50 millions d’euros, permet indéniablement de limiter les coûts pour les Jeux.

Il y a peu, l’entreprise VINCI, l’une des parties au Consortium du Stade de France, avait pourtant émis l’idée de procéder à une lifting géant pouvant notamment conduire à l’installation d’un toit au dessus de l’enceinte. Mais ce plan d’au moins 450 millions d’euros n’est pas vraiment au goût des pouvoirs publics.

Vue des tribunes et de la toiture du Stade de France (Crédits – Sport & Société)

La réponse du Premier Ministre au Premier Président de la Cour des Comptes en est une parfaite illustration.

Au-delà de l’impératif de limiter les coûts, la lettre adressée par Édouard Philippe fait aussi mention du respect du cadre juridique, au regard du droit français, du droit européen, ainsi que des engagements formulés à l’égard de World Rugby et du Comité International Olympique (CIO). La lettre fait également mention des délais serrés autour des échéances sportives à venir (2023-2024) et de la nécessité de maintenir la piste d’athlétisme existante en vue des Jeux.

Ainsi, comme le précise la lettre de cinq pages en date du 20 novembre 2018 :

[La suppression de la piste d’athlétisme] peut sans doute être rentable à long terme mais ne devrait être mise en œuvre qu’après les Jeux Olympiques et Paralympiques puisque les épreuves d’athlétisme sont programmées au Stade de France, le football étant prévu au Parc des Princes s’agissant des épreuves parisiennes.

La réalisation d’importants travaux sur l’équipement ne peut se concevoir que dans le cadre d’une nouvelle convention d’occupation portant sur les décennies à venir. Quel qu’en soit le statut juridique futur (cession, concession ou convention d’occupation domaniale), une mise en concurrence devra être préparée et organisée par l’État dans des conditions de sécurité juridique permettant d’éviter les futurs contentieux, tant vis-à-vis du droit français que du droit européen.

En effet, le droit de la commande publique ne permet pas d’envisager de prescrire des travaux de grande ampleur dans le cadre d’un avenant à la concession actuelle.

En lieu et place de grands travaux non-indispensables à l’heure actuelle pour la structure de Saint-Denis, le Premier Ministre préfère donc se cantonner aux engagements pris avec le CIO, renvoyant à l’après-2025, la possibilité d’une rénovation d’ampleur. Une manière de rappeler l’impératif budgétaire et d’éloigner aussi la perspective d’un retard dans les aménagements.

Visuel du Stade de France présenté durant la phase de candidature aux JO 2024 (Crédits – Paris 2024 / Elie Stephane Azoulay / DDPI / Luxigon)

Les travaux qui seront menés d’ici 2023-2024 seront assurés par un financement tripartite entre le Consortium concessionnaire du Stade de France (travaux courants, entretien de l’ouvrage), les organisateurs des événements (spécificités des installations) et les financeurs publics, par l’intermédiaire de la Société de Livraison des Ouvrages Olympiques (SOLIDEO), via l’enveloppe de 50 millions d’euros mentionnée précédemment. La SOLIDEO, présidée par la Maire de Paris, Anne Hidalgo, veillera en outre au respect du calendrier imposé et au bon déroulement du chantier qui devra être mené par le Consortium.

Les modalités dudit chantier – montant global et programmation technique – seront prochainement précisées.

Édouard Philippe a en effet indiqué que ces modalités seront arrêtées d’ici la fin de l’année 2018, ce qui laissera un temps adéquat pour envisager les aménagements et parvenir à la livraison d’un Stade de France lifté pour le printemps 2023.

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