Agenda 2020 : La réforme de la procédure de candidature et la réduction des coûts, priorités du CIO

En présentant les 40 recommandations de sa grande réforme Agenda 2020, le Comité International Olympique (CIO) veut montrer sa capacité de remise en question et surtout, sa volonté d’innover et d’apporter des solutions concrètes et pertinentes afin de maintenir l’intérêt des villes à l’égard des Jeux Olympiques et Paralympiques.

Pour se faire, le CIO proposera à la 127e Session réunie les 08 et 09 décembre, d’adopter une série de mesures parmi lesquelles une refonte globale de la procédure de candidature ainsi que des éléments pour réduire le coût de ces dernières.

De ce fait, la Recommandation 1 propose de « positionner la procédure de candidature en tant qu’invitation ».

Concrètement, le CIO propose d’inviter « les Villes Candidates potentielles à présenter un projet olympique qui correspond le mieux à leurs besoins sportifs, économiques, sociaux et de planification environnementale à long terme ».

CIO - 127e Session

L’institution de Lausanne (Suisse) souhaite notamment instaurer une phase d’assistance afin d’apporter des conseils aux villes désireuses de se porter candidates et ce, dans le but de démontrer l’héritage olympique de précédentes éditions et d’orienter les possibles choix des villes (Recommandation 1, point 1). En d’autres termes, le CIO veut épauler les villes pour éviter des dérives, en particulier en ce qui concerne l’aménagement d’infrastructures dont le devenir ne serait pas garanti à l’issue des Jeux.

L’avis d’experts indépendants sera également recueilli en matière d’héritage et de durabilité des projets olympiques présentés (Recommandation 2, point 6).

Sur le même point d’ailleurs, le CIO veut promouvoir le recours, aussi souvent que possible, à des équipements déjà existants et, si cela n’est pas suffisant, à l’implantation de structures temporaires et démontables (Recommandation 1, point 2).

Cela fait sans aucun doute suite aux critiques émises contre l’organisation des Jeux d’Athènes 2004 et la construction d’installations pérennes dont la reconversion est plus que limitée (30% des sites) mais encore contre celle des Jeux de Sotchi en février dernier et les coûts exorbitants engendrés (36 milliards d’euros).

Cela fait également suite à l’organisation des Jeux de Londres 2012 avec l’installation de structures démontables au cœur du Parc Olympique, à l’instar du Pavillon de basketball (12 000 places), mais encore des tribunes du Centre Aquatique dont la capacité est passée de 17 500 places à 2 500 places entre 2012 et la réouverture du site il y a quelques mois.

Dans le cadre d’une candidature olympique de Paris pour les Jeux de 2024, les autorités sportives et politiques françaises pourront se targuer de posséder la majeure partie des équipements nécessaires à l’accueil de l’événement.

Ainsi, le Stade de France (81 000 places) serait parfaitement approprié pour devenir Stade Olympique. Les stades de Roland Garros, du Parc des Princes ou encore de Jean Bouin seraient également adéquats pour héberger respectivement les épreuves de tennis ainsi que les matchs des tournois de football et de rugby à sept.

Le nouveau Palais Omnisports de Paris Bercy (POPB) – qui deviendra dès 2015 la Bercy Arena – offrira pour sa part une capacité conséquente (plus de 17 000 sièges) pour les sports collectifs (basketball, handball…).

D’autres sites, plus récents et directement liés aux précédentes tentatives olympiques tricolores pourraient aussi être associés à un nouveau projet. Ce serait le cas du Vélodrome National de Saint-Quentin-en-Yvelines (5 000 places) récemment inauguré, ainsi que de la Base Nautique de Vaires-sur-Marne en cours de réaménagement.

Par conséquent, un projet olympique porté par Paris devrait s’engager dans la construction – temporaire ou pérenne selon les besoins ultérieurs – d’un Centre Aquatique et d’un Village Olympique. L’aménagement d’une nouvelle grande salle multifonctionnelle pourrait aussi se poser.

Quoiqu’il en soit, le peu de construction nécessaire aux JO permettrait de limiter le budget d’organisation de l’événement international.

Athènes 2004 - piscine de plongeon

Outre cet aspect de l’héritage olympique et, disons-le, de la lutte contre les « éléphants blancs », le CIO cherche à valoriser la durabilité des installations et cela passe aussi par une dérogation exceptionnelle à la règle primant jusqu’alors et qui prévoit qu’une Ville Hôte ou tout du moins, un même pays, se doit d’accueillir l’ensemble des épreuves et compétitions inscrites au programme olympique.

La Charte olympique permet aujourd’hui de déroger à ce principe mais de manière limitée. Il s’agit en priorité des Jeux d’hiver et ce, dans un souci de topographie ou de géographie du territoire.

Désormais, une Ville Organisatrice pourra proposer l’appui d’un autre pays pour accueillir une ou plusieurs épreuves, pour « des raisons de durabilité » (Recommandation 1, point 3).

De ce fait, outre les mesures existantes – mais jamais vraiment appliquées – le principe de durabilité sera à présent inscrit dans le marbre de la Charte olympique.

Étroitement liée aux problématiques d’aménagement du territoire et de durabilité des installations olympiques, la question environnementale sera pleinement reconnue dans la nouvelle réglementation olympique et sera intégrée en conséquence dans le Contrat Ville Hôte, de même que le respect des normes internationales en matière de conditions de travail (Recommandation 1, point 5).

Comme pour la question de la construction des infrastructures et de leur utilisation post-olympique, ces deux éléments ont sans nul doute été renforcés par le constat des dérives des Jeux de Pékin 2008 et de Sotchi 2014, tant en ce qui concerne les conditions de travail des ouvriers sur les chantiers, que le respect des normes environnementales.

Concernant encore la procédure de candidature, l’instance olympique rendra public le Contrat Ville Hôte (Recommandation 1, point 6). Jusqu’à aujourd’hui, ce contrat demeurait secret et aucune version publique complétée n’était dévoilée.

Pour les prochaines échéances olympiques, une présentation des axes du contrat liant les parties prenantes à l’organisation des JO sera effectuée. Cela devrait dès lors de répondre – en partie du moins – aux accusations tenant à l’opacité et le manque de transparence dans le fonctionnement et la gouvernance du CIO.

Palais des Glaces Bolchoï de Sotchi

Amorcé peu de temps avant le retrait de la candidature d’Oslo (Norvège) pour les Jeux d’hiver 2022, le renforcement de la contribution financière du CIO au Comité d’Organisation (COJO) sera inscrit dans le Contrat Ville Hôte (Recommandation 1, point 7).

Pour 2022, le montant de cette contribution sera supérieur à 880 millions de dollars (692,4 millions d’euros). Une somme non-négligeable mise sur la table par le CIO et qui aurait pu permettre le maintien de la capitale norvégienne, favorite techniquement, dans la course aux Jeux.

Une somme apposée comme un coup de poker face à une classe politique nationale frileuse voire même hostile. Cette dernière a d’ailleurs fini par abandonner l’idée d’accorder les garanties nécessaires à la poursuite de l’aventure olympique.

Pour une meilleure lisibilité et compréhension de la part des pouvoirs publics et de l’opinion, les budgets olympiques seront précisés et distingués en deux catégories (Recommandation 2, point 4).

« D’une part, l’investissement à long terme dans les infrastructures et le retour sur investissement, et d’autre part, le budget de fonctionnement ».

Dans un souci de lisibilité mais également de transparence, le CIO devrait par ailleurs s’engager dans le suivi et la mise en place d’un registre auprès duquel devront s’inscrire les consultants et lobbyistes travaillant au service de telle ou telle Ville Candidate.

Comme le stipule d’ailleurs la Recommandation 3, point 4, « une acceptation formelle du Code d’éthique du CIO et des règles de conduite par ces consultants et lobbyistes sera une condition préalable à l’inscription sur ce registre ».

Une manière de garantir le professionnalisme et la rigueur des personnes gravitant autour et dans la sphère d’une candidature aux Jeux. Une manière surtout d’écarter les critiques relatives aux éventuels « pots-de-vin » ou trafics d’influence dont les membres de la prestigieuse institution seraient l’objet.

Évoquée par certains candidats à la présidence du CIO, en septembre 2013, l’interdiction des visites sur le terrain par les membres du CIO ne sera pas affectée par une quelconque remise en cause.

Le scandale de l’attribution des JO 2002 à Salt Lake City (États-Unis) reste dans les esprits et personne en situation de gouverner l’instance aujourd’hui ne souhaite rouvrir cette épineuse question sujette à toutes les spéculations de corruption.

Toujours dans un objectif de transparence et de réduction des coûts de candidature, le CIO s’engagera dans l’aide aux Villes Candidates et prendra notamment en charge les coûts relatifs aux déplacements de la Commission d’évaluation, ainsi que des déplacements et l’hébergement des délégués accrédités de chaque Ville Candidate aux différentes réunions majeures jalonnant la campagne olympique (Recommandation 3, point 2).

Rigueur budgétaire et modernité obligent, le dossier de candidature des Villes Candidates sera désormais publié uniquement sous format électronique (Recommandation 3, point 3). Exit donc les milliers de pages condensant les grands axes des villes intéressées et distribuées à la centaine de membres du CIO.

Rio 2016 - choix du mobilier du Village Olympique

Bien souvent oubliée, la problématique du confort des athlètes sera remplacée au cœur de la procédure de candidature puisque le CIO souhaite ajouter un nouveau critère à la sélection des 14 critères actuels pour l’évaluation des Villes Candidates.

De fait, « l’expérience des athlètes » sera analysée et étudiée, de même que leur implication dans la réalisation et la confection du projet olympique.

Cet élément sera dès lors un préalable intéressant avec l’intégration des athlètes à l’organisation de l’événement, à l’instar de Rio 2016 qui a récemment fait appel à des sportifs de haut-niveau afin de tester le mobilier qui sera installé dans les chambres du Village Olympique des prochains JO d’été.

Les différentes mesures envisagées par le CIO pour réformer le processus de candidature et le coût de celui-ci sont de nature à faciliter le dépôt des projets et à rendre la procédure plus abordable.

Quant à savoir si cela aura des répercussions positives en matière d’attractivité, un premier indice pourrait être donné dès l’année prochaine avec l’ouverture des candidatures aux JO 2024.

Mais si les Olympiades d’été ne souffrent pas d’un déficit d’intérêt, le cas des Jeux d’hiver est tout autre. C’est sur ce point précis que la réforme olympique pourrait apporter des solutions et permettre de redynamiser un concept qui aujourd’hui peine à convaincre, comme en témoigne le peu de candidatures en lice pour les JO 2018 (PyeongChang, Munich et Annecy) et surtout 2022 (Almaty et Pékin).

Illustrations :
– Logo officiel de la 127e Session du CIO (Crédits – CIO / Flickr)
– Vue de la piscine olympique de plongeon d’Athènes 2004 (Crédits – Getty Images / Milos Bicanski)
– Vue nocturne du Palais Bolchoï de Sotchi 2014 (Crédits – CIO / Getty Images)
– Test du mobilier des Jeux de Rio 2016 (Crédits – Rio 2016 / Alex Ferro)

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