Tokyo 2020 : Maintien ou non des Jeux ? Les États-Unis en position d’arbitre

Au moment où le monde affronte l’épidémie de Coronavirus et alors que des mesures drastiques de confinement ont été engagées par les autorités régionales et nationales dans plusieurs pays, le sort des Jeux Olympiques et Paralympiques d’été de Tokyo 2020 reste en suspens et divise. Notamment aux États-Unis.

Vue du siège du Comité Olympique et Paralympique des États-Unis à Colorado Springs (Crédits – USOPC)

Tandis que certains acteurs sportifs plaident dès à présent pour un report des Jeux, d’autres préfèrent attendre.

Aux États-Unis, deux positions s’affrontent ainsi concernant la prochaine échéance olympique et paralympique : les tenants d’un décalage dans le temps des JO 2020 et les partisans du statut-quo, qui entendent suivre les recommandations des organismes compétents – Organisation Mondiale de la Santé (OMS) en tête – sur l’évolution de la situation sanitaire mondiale.

En cette fin de semaine, ces deux positions se sont d’ailleurs publiquement exprimées et témoignent du dilemme qui se pose aujourd’hui aux décideurs sportifs.

A l’issue d’une réunion au sommet, le Comité Olympique et Paralympique des États-Unis (USOPC) a exposé ce vendredi sa position et ses arguments pour maintenir en l’état l’organisation des Jeux à compter du 24 juillet. Auparavant, la puissante Fédération Américaine de Natation – USA Swimming – avait fait part de ses doutes concernant la tenue effective des Jeux et avait même implicitement demander à l’USOPC de favoriser un report de l’événement auprès du CIO et ce, afin de garantir la santé des athlètes et leur préparation physique.

(Crédits – USOPC)

Dans une réponse publiée sur le site Internet de l’institution, la Présidente et la Directrice Générale de l’USOPC – Sarah Hirshland et Susanne Lyons – n’ont pas tardé à rappeler que la priorité demeurait avant toute chose, la sécurité des compétiteurs, mais qu’en même temps, il était nécessaire de faire confiance aux autorités sportives, en premier lieu desquelles le Comité International Olympique (CIO) et le Comité International Paralympique (IPC) :

En ce qui concerne les Jeux, nous avons entendu des athlètes dire qu’ils voulaient que la communauté olympique et paralympique soit très claire sur la voie à suivre. Ils veillent à ce que nous ne leur retirions pas prématurément la possibilité de participer aux Jeux tant que nous n’avons pas une meilleure visibilité sur la situation.

L’USOPC est en communication constante avec le CIO et l’IPC qui ont fait savoir que la priorité était la santé et le bien-être des athlètes et des personnes engagées et qu’ils continueraient de s’appuyer sur les conseils et recommandations pour adopter une position le moment venu.

Ils estiment aujourd’hui qu’il est prématuré de statuer sur une décision concernant la date des Jeux et nous pensons en conséquence que nous devrions leur donner la possibilité de recueillir davantage de données et de conseils d’experts avant d’engager une prise de décision.

En d’autres termes, l’USOPC se cale à ce stade sur le CIO dont le Président, Thomas Bach, a réitéré hier la position.

Et si l’institution de Lausanne (Suisse) entrouvre désormais la possibilité d’un report de l’événement planétaire, l’USOPC entend se tenir prêt à affronter n’importe quelle situation. Dans le communiqué publié ce vendredi, l’institution de Colorado Springs (Colorado) mentionne ainsi que :

Nous faisons un énorme travail pour planifier différents scénarios en essayant d’être aussi préparés que possible.

Nous espérons que nos athlètes auront la capacité de réaliser leurs rêves avec les Jeux de Tokyo 2020 et nous ferons tout ce que nous pouvons pour ne pas les abandonner et pour les soutenir dans leur préparation pré-olympique.

Cérémonie d’allumage de la flamme olympique de Tokyo 2020, jeudi 12 mars 2020 (Crédits – CIO / Greg Martin)

Quoiqu’il en soit, il faudra certainement compter sur le positionnement de l’USOPC qui, du fait de l’engagement des États-Unis au sein du Mouvement Olympique – à la fois en ce qui concerne la présence de membres au CIO (3 membres actifs, 1 membre honoraire, 1 membre d’honneur), le palmarès des athlètes américains sur les dernières Olympiades, sans oublier le financement des droits télévisés par NBC Universal – dispose d’un poids relativement conséquent.

De ce fait, les États-Unis pourraient bien avoir un rôle d’arbitre auprès du CIO, alors que des Fédérations sportives nationales ou des Comités Nationaux Olympiques pourraient être tentés de s’exprimer publiquement dans les semaines à venir. Certaines déclarations de décideurs ou d’athlètes à travers le monde montrent d’ailleurs une poussée en direction d’un report de l’événement (Canada, Norvège, etc.).

Aujourd’hui, le soutien clairement affiché par l’USOPC à l’égard de la « maison-mère » est donc sans nul doute un motif de satisfaction pour le CIO, qui entend plus que jamais rester maître des horloges concernant le calendrier des prochains Jeux d’été.

A ce titre, deux questions auront leur importance quant à la future décision qui sera celle du CIO : la question financière d’une part, et la question sanitaire d’autre part.

Pour ce qui est de la problématique financière, le CIO n’a de cesse de marteler que les caisses sont pleines. Comme l’a en effet rappelé Thomas Bach cette semaine, la trésorerie de l’institution n’est pas un souci. Une trésorerie qui est largement abondée par la puissance de feu des États-Unis, avec en particulier l’apport de NBC Universal qui, depuis 2014 et jusqu’en 2032 au moins, est engagé dans un partenariat inédit à hauteur de 7,65 milliards de dollars. Le prix d’une Olympiade.

Le positionnement américain – et le changement éventuel de celui-ci – sera donc à scruter avec attention.

(Crédits – Tokyo 2020)

Au-delà de la seule question financière – que certains considéreront comme dérisoire compte-tenu du contexte – la problématique sanitaire aura bien entendu son importance, d’autant plus si l’épidémie de Coronavirus venait à se déployer massivement sur le sol américain.

A ce jour, la Ville de New-York, la Ville de Los Angeles et l’État de Californie ont déjà acté le placement de la population en confinement, alors que le Président des États-Unis, Donald Trump, se refuse pour l’instant à faire de même pour l’ensemble du pays et ses plus de 325 millions d’habitants.

En se laissant le temps de la réflexion – sans doute jusqu’au début du mois de mai – le CIO et ses alliés veulent pouvoir mesurer l’évolution de la situation, dans un sens ou dans l’autre.

En cas d’endiguement de l’épidémie, la sauvegarde des Jeux à l’été 2020 pourrait être assurée. En revanche, en cas de propagation continue aux quatre coins du globe, le CIO n’aurait d’autre choix que de prononcer un report, après moult discussions avec ses soutiens.

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