JO 2024 : Pour Rome, l’aventure prend fin avec une vidéo et un dossier de candidature inachevé

Inéluctable depuis l’annonce de Virginia Raggi à la fin du mois de septembre dernier, le retrait de la candidature olympique et paralympique de Rome 2024 devait encore être officialisé auprès du Comité International Olympique (CIO) par l’intermédiaire du Comité Olympique Italien (CONI).

C’est désormais effectif, après la conférence de presse du Président du CONI, Giovanni Malago, survenue en ce début de semaine.

Malgré l’officialisation de ce retrait – le deuxième d’une candidature de Rome après celui pour les JO 2020 – le CONI a tout de même rendu public le second volet du dossier technique consacré à la gouvernance, aux aspects juridiques et au financement des sites.

Ce volet, transmis au CIO par les trois autres Villes Candidates et dont « Sport & Société » a présenté un compte-rendu détaillé pour chacune (Los Angeles ; Budapest ; Paris), présente notamment une actualisation du concept initialement proposé.

Si l’esprit et l’héritage des JO 1960 sont toujours présents, la volonté de poursuivre et surtout d’achever l’aménagement de certains quartiers est également à l’ordre du jour. Cette volonté s’exprime par exemple au travers de la dernière vidéo publiée par le Comité de Candidature.

Reprenant les éléments de langage du communiqué de presse ayant suivi la décision de la Maire de Rome, la vidéo se base surtout sur la richesse du patrimoine de la « Ville Éternelle » et s’attarde de longues secondes sur le projet encore inachevé de la « Citta dello Sport » dans le quartier de Tor Vergata.

Ce projet – dont le coût a sensiblement augmenté au cours des dernières années pour avoisiner la somme de 600 millions d’euros – fut l’un des arguments de la Maire de Rome pour dénoncer la pertinence de la candidature et refuser d’apporter un quelconque soutien institutionnel, politique et surtout financier.

Visuel du projet de Citta dello Sport à Tor Vergata (Crédits - Roma 2020)
Visuel du projet de Citta dello Sport avec l’aménagement de deux arènes multifonctionnelles à Tor Vergata (Crédits – Roma 2020)

L’absence de soutien de la part de la Municipalité a d’ailleurs été mentionnée dans le volet technique consacré à la gouvernance.

Le Comité de Candidature de Rome 2024 expose notamment que « le 29 septembre, le Conseil Municipal a voté le retrait de son soutien à la candidature, même si aucune confirmation officielle n’a encore été reçue ».

Ces quelques mots sont les seuls éléments qui figurent dans le dossier, le reste du document étant dédié à l’apport de garanties sur la forme de gouvernance qu’aurait pu prendre le Comité d’Organisation des JO 2024, ou encore sur le financement des sites.

Faute de soutien de la part des autorités, une part importante de cette dernière caractéristique n’a pas été compilée au sein du dossier de candidature. En effet, si l’on mesure bien un budget hors-COJO d’un montant de 2,860 milliards d’euros (2,596 milliards d’euros), il est en revanche difficile de parvenir à une estimation claire de la partie COJO.

Il est toutefois possible de remarquer l’évaluation d’une modernisation du Stade Olympique du Foro Italico pour 50,54 millions de dollars (45,9 millions d’euros) ou encore une enveloppe de 883,336 millions de dollars (802,243 millions d’euros) pour la construction du Village des Athlètes à Tor Vergata, près de l’Université du même nom.

Concernant le site de la « Citta dello Sport », un investissement global de 569,46 millions de dollars (517,182 millions d’euros) a été inscrit au dossier, dont 542,11 millions (492,34 millions d’euros) à la charge de financements publics.

Sur ce dernier point, et au-delà de ces quelques chiffres, ce qui frappe surtout à la lecture du dossier, c’est la place importante accordée aux pouvoirs publics.

Ainsi, le dossier de candidature mentionne que « tous les investissements liés à de nouvelles infrastructures ou à des travaux permanents sur des sites existants seront financés par le Gouvernement italien.

La seule exception concerne le nouveau Stade de l’AS Roma qui sera assuré par un financement privé ».

Ce modèle de financement n’est pas sans rappeler ici celui récemment annoncé par le Comité de Candidature de Budapest 2024.

rome-2024-gouvernance

Sur le plan de la gouvernance, Rome 2024 avait prévu d’établir – en cas de succès de la candidature – un Comité d’Organisation, dont les membres auraient été nommés par le Gouvernement Italien, la Ville de Rome, la Région du Latium, le CONI et le Comité Paralympique Italien (CIP).

Les membres italiens du CIO, des représentants du CONI et du CIP auraient également siégé au sein de l’instance décisionnelle, de même que d’anciens sportifs emblématiques.

Au côté du COJO, une Agence de Planification Olympique (AGENZIA) aurait été installée afin de livrer les infrastructures nécessaires aux Jeux.

Au dessus de ces instances, et sur le modèle de ce que propose Budapest 2024, un Conseil Olympique aurait été chargé de superviser l’ensemble des projets.

Comme pour sa rivale hongroise et comme pour l’aspect portant sur le financement des sites, la candidature italienne aurait alors misé sur une forte présence du monde institutionnel et politique, ce dernier étant représenté à divers échelons.

Ainsi, selon les termes évoqués dans le dossier de candidature, « le Conseil Olympique sera mis en place et comprendra des représentants du Gouvernement italien – coordonné par le Bureau du Président du Conseil italien – ; le Maire de Rome ; le Président de la Région du Latium ; le Président du COJO ; le Président du CONI et le Président du CIP.

Ce Conseil Olympique sera chargé d’assurer la supervision, la coordination stratégique et le suivi du projet olympique et paralympique.

Il sera présidé par le Président du Conseil italien et inclura un représentant de l’Agence Nationale de Lutte contre la Corruption (ANAC) pour assurer les plus hauts standards de transparence et de responsabilité dans toutes les étapes de la planification des Jeux et de leur livraison.

Le Conseil supervisera également la mise en place du COJO et de l’Agenzia, instance en charge de la livraison des infrastructures qui sera créée par une Loi Olympique ».

Concernant l’héritage des Jeux, Rome 2024 aurait instauré un Groupe de travail sous la direction du Conseil Olympique.

Ce Groupe aurait été composé de représentants du COJO – sous la responsabilité du Directeur de l’Héritage – mais également du Gouvernement italien, de la Ville de Rome, de la Région du Latium, du CONI, du CIP, des Universités de Rome, dont celle de Tor Vergata, sans négliger non plus des représentants de la Chambre de Commerce de Rome, et plus étonnant, du groupe audiovisuel de la RAI.

Les Organisations Non-Gouvernementales et les associations environnementales auraient par ailleurs été associées à la conception de la planification du projet d’héritage.

Vue aérienne du Stadio Olimpico de Rome (Crédits - Roma 2024)
Vue aérienne du Stadio Olimpico de Rome (Crédits – Roma 2024)

Enfin, en ce qui concerne le domaine sensible mais toujours essentiel du soutien populaire, Rome 2024 a mentionné dans son dossier de candidature, un sondage réalisé par l’institut IPSOS en septembre 2016.

Selon cette enquête*, 63% des Romains et 67% des Italiens ont affirmé souhaité que Rome puisse accueillir les Jeux.

Bien que ces chiffres soient plus que positifs, il est cependant intéressant de constater un recul de l’engouement de la population pour la candidature. Si l’on se réfère à un précédent sondage – publié le 19 janvier 2016 par le même institut – 66% des Romains et 77% des Italiens se déclaraient alors favorables à l’accueil des Jeux.

Peut-être conscient de cette érosion, le Comité de Candidature a retenu du dernier sondage la perception des Jeux auprès de la population.

Dans le détail de la dernière enquête, 82% des sondés ont ainsi indiqué que l’organisation des Jeux serait un boosteur pour l’économie et l’emploi, tandis que 78% ont mentionné la promotion d’une image positive de l’Italie sur la scène internationale.

(Crédits - Virginia Raggi / Page Facebook)
(Crédits – Virginia Raggi / Page Facebook)

Si différents critères ont pu entrer en ligne de compte pour justifier la décision de la Maire de Rome, il paraît évident que Virginia Raggi a fondé son choix sur la crainte d’un dérapage des coûts.

Elle l’avait d’ailleurs évoqué quelques semaines avant de prendre sa décision, en rappelant notamment la dette laissée par la Coupe du Monde de football de 1990.

Une telle crainte n’était peut-être pas infondée, en particulier lorsque Virginia Raggi a dû prendre connaissance du volet consacré au financement des sites, et lorsqu’elle a fait le constat du poids majeur attendu du financement public, ainsi que de la situation politique et économique de la ville et plus largement de l’Italie.

Une chose est sûre : avec le retrait de Rome, l’hécatombe olympique se poursuit, au grand dam du CIO.

* Sondage réalisé auprès d’un échantillon représentatif composé de 2 300 personnes.