“RMC Sport” publie ce Dimanche une enquête autour d’une information qui pourrait faire grand bruit dans les semaines qui viennent : selon l’hebdomadaire “Le 10 Sport”, le Qatar souhaiterait en effet devenir l’investisseur majoritaire au sein du Consortium gérant le Stade de France, la plus grande enceinte sportive de France (80 000 spectateurs).
Selon plusieurs sources, les dirigeants du club de football du Paris Saint-Germain (PSG) désireraient s’installer dans un stade à la mesure de leurs ambitions car selon eux, le Stade de France serait le “seul écrin francilien capable […] d’abriter une équipe de football de standing international”. Le Qatar Sports Investments (QSI) souhaiterait ainsi faire évoluer le club parisien pour en faire un poids lourd du football mondial, au même titre que le FC Barcelone ou Manchester United.
Car au Parc des Princes, enceinte historique du PSG, la situation ne serait pas des plus simples pour les investisseurs et propriétaires du club : la Ville de Paris refuse une destruction-reconstruction du site – pour porter la capacité à plus de 50 000 places assises – et une rénovation ne pourrait se faire qu’à partir d’un cahier des charges très précis compte tenu que l’architecte d’origine (Roger Taillibert) a toujours un droit de regard sur les évolutions de “son” stade, du point de vue de la propriété intellectuelle. Sur ce dernier aspect, il n’est d’ailleurs pas étonnant que les rénovations envisagées par la Ville de Paris dans le cadre de l’Euro 2016 de Football ne soient que minimes malgré un coût estimé à 110 millions d’euros.
La construction du Parc des Princes fut, dans les années 1960, l’un des grands projets architecturaux du pays. Ainsi, comme l’a affirmé le “Time Magazine” en 1972, il était “l’un des ouvrages les plus importants sur le plan de la qualité architecturale qui ait été réalisé à Paris depuis trente ans, avec le siège du Parti Communiste d’Oscar Niemeyer”. D’un coût de 90 millions de francs, sa construction avait été décidée par le Président Charles de Gaulle afin d’équiper l’Ile-de-France d’un stade de grande capacité.
L’histoire du Parc est toutefois plus ancienne puisqu’un premier espace fut aménagé en 1897 (tribunes de 12 000 places et piste cyclable) et un vélodrome fut construit en 1932, d’une capacité de 50 000 places. L’aménagement progressif du périphérique parisien nécessita cependant la destruction partielle de l’enceinte, ce qui contribua à la réalisation du Parc des Princes tel que nous le connaissons aujourd’hui.
Inauguré en 1972 à l’occasion de la Finale de la Coupe de France de Football, le Parc accueille le PSG pour la première fois un an plus tard et quelques mois avant l’accession du club en Division 1 (aujourd’hui Ligue 1). Outre les matchs de football, dont six rencontres du Mondial de Football 1998, le stade accueille des événements culturels de premier plan comme les concerts de Johnny Hallyday, Madonna… durant de nombreuses années jusqu’à la construction du Stade de France.
Le déménagement du club de football parisien pour le Stade de France aurait donc des conséquences lourdes, notamment pour la Ville de Paris propriétaire, et pourrait même compromettre l’avenir du Parc des Princes. En effet, à l’heure actuelle, le Parc n’accueille qu’un seul club résident et la construction prochaine, dans l’Ouest parisien, d’infrastructures sportives ne devrait pas être un bon signe pour le mythique stade parisien : En 2013, le club de rugby du Stade Français inaugurera le nouveau Stade Jean Bouin dont la capacité sera portée à 20 000 places. Un an plus tard, ce sera au tour du Racing-Métro de dévoiler son écrin, l’Arena 92, d’une capacité de 35 000 places. Implantée à Nanterre à quelques pas de l’Arche de la Défense, l’Arena 92 sera, comme son nom l’indique, un espace multifonctionnel. Il ne faut pas oublier enfin la renaissance du complexe de tennis de Roland-Garros dont l’extension est prévue dès cette année et jusqu’en 2016… Quatre stades, tous différents du fait de leur utilisation, mais pour un public en grande partie francilien.
La conséquence première d’un départ du PSG pourrait donc être la remise en cause de la rénovation du Parc pour l’Euro 2016 et même le retrait du stade, de la liste des sites hôtes de l’événement continental, au profit d’une autre enceinte, dans l’Ouest de la France par exemple. Une véritable descente aux enfers progressive donc pour un stade qui a accueilli par le passé, les plus grands événements sportifs et culturels de la capitale. Un retrait progressif du PSG amènerait peu à peu, propriétaires et investisseurs à s’interroger sur la viabilité sportive et surtout économique d’un stade inoccupé de 50 000 places…
Pour le Stade de France en revanche, l’arrivée des investisseurs Qataris devrait apporter une bouffée d’oxygène, après le départ annoncé, affirmé et réaffirmé, de l’équipe de France de rugby pour un stade multifonctions de 80 000 places dans le Sud de l’Ile-de-France, d’ici à 2017. Ce départ aurait pu avoir quelques conséquences – bien que limitées – compte tenu que l’enceinte sportive n’a jamais été une enceinte affiliée à un club mais plutôt un grand stade de “location” pour le football, le rugby, les rallyes, les spectacles et autres concerts de stars nationales et internationales.
Construit dès 1995 pour un investissement de l’ordre de 2,4 milliards de francs soit 365 millions d’euros, le Stade de France doit pourtant son existence à l’attribution, par la Fédération Internationale de Football (FIFA), de l’organisation de la Coupe du Monde 1998 à la France. Le pays ne disposait alors pas d’une enceinte de plus de 50 000 places et les acteurs du projet ont donc souhaité aménager, en bordure de Paris, un stade central de part sa capacité (80 000 places) et sa fonctionnalité (événements sportifs et autres). La cérémonie d’inauguration est à la mesure du chantier, impressionnante, et réunissant pas moins de 1 300 jeunes autour d’une thématique haute en couleurs rappelant, comme le présenta à l’époque le Journal Télévisé de France 2, “la Cérémonie d’Ouverture des Jeux Olympiques d’Albertville, six ans plus tôt”.
Depuis, le Stade de France est devenu l’hôte des plus grandes manifestations sportives et culturelles organisées dans l’Hexagone : Mondial de Football 98 donc mais les Finales de la Ligue des Champions 2000 et 2006 ainsi que les Mondiaux d’Athlétisme 2003. A l’occasion de la Candidature de Paris à l’accueil des Jeux Olympiques et Paralympiques d’été 2012, le Stade de France fut présenté comme possible et logique, Stade Olympique. Malgré la défaite de Paris face à Londres, le Stade de France demeure une enceinte des plus prisées par les fédérations sportives mais aussi par les sociétés de spectacles, françaises et internationales. Le stade a ainsi accueilli les Rolling Stones, U2, Madonna, Céline Dion mais encore Indochine et Johnny Hallyday.
Pour l’Euro 2016, le Stade de France accueillera les cérémonies officielles et la finale.
L’investissement du Qatar devrait, selon “RMC Sport”, avoisiner les 300 millions d’euros, avec une prise de capital dans le consortium à hauteur de 40 à 60%, les entreprises actuelles – Vinci et Bouygues – ne disposant dès lors plus que de 20 à 30% chacune, même si l’Etat resterait propriétaire du site.
Mais surtout, un tel investissement pourrait ouvrir les portes du Qatar à ces deux multinationales françaises, en vue de l’organisation de la Coupe du Monde de Football 2022, pour laquelle le Qatar prévoit des aménagements colossaux de l’ordre de 100 milliards de dollars, une aubaine pour les entreprises françaises qui laisseraient entrer plus facilement le Qatar dans ce qui est encore leur “domaine réservé”, à savoir le Stade de France.
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