JO 2036-2040 : Le Sénat de Berlin pourrait encourager une candidature

Maintes fois évoquée ces dernières années, l’idée d’une nouvelle candidature olympique et paralympique allemande pour l’organisation d’une future édition des Jeux d’été, incluant la capitale fédérale, pourrait prochainement bénéficier de l’appui du Sénat de Berlin.

Vue du Stade Olympique de Berlin (Crédits – Site officiel de l’Olympiastadion Berlin)

Comme au moment de décider d’une candidature aux JO 2024, le Sénat berlinois pourrait jouer un rôle déterminant pour donner un coup d’accélérateur à la réflexion autour de l’établissement possible d’un nouveau projet olympique et paralympique pour l’édition 2036 ou 2040.

Quelques semaines après les élections régionales du 12 février 2023 – convoquées suite à l’annulation du scrutin de septembre 2021 prononcée par la Cour Constitutionnelle – un accord de coalition a été présenté au début du mois d’avril entre les leaders régionaux du Parti Social-Démocrate (SPD) et de l’Union Chrétienne-Démocrate (CDU) et prévoit notamment de soutenir l’initiative d’un projet qui succéderait alors à la tentative infructueuse pour 2024.

Si ledit accord doit encore recueillir l’appui des instances des deux partis appelés à gouverner ensemble jusqu’aux prochaines élections en 2026 – avec un vote prévu chez le SPD le 23 avril, puis un vote annoncé chez la CDU le 24 avril avant une ratification possible le 26 avril – il démontre en tout cas la volonté des deux mastodontes de la politique allemande d’encourager l’émergence d’une candidature dont les contours resteraient à définir, à l’aune des réformes olympiques engagées et au regard des attentes et exigences du Comité Olympique Allemand (DOSB) qui a tracé une feuille de route en fin d’année passée.

De fait, l’accord intitulé « Das Beste für Berlin »« Le meilleur pour Berlin » – énonce explicitement :

La coalition réaffirme qu’elle est prête à ce que Berlin soit disponible comme site dans le cadre d’une éventuelle candidature nationale avec un concept durable pour accueillir les Jeux Olympiques et Paralympiques d’été en Allemagne.

Nous voyons cela comme une grande opportunité pour Berlin, que nous voulons utiliser.

Une fois les Jeux terminés, les installations sportives rénovées et modernisées seront disponibles pour le sport à Berlin dans le cadre d’une variété d’utilisations.

Au travers de cette déclaration, le SPD et la CDU évoquent la perspective d’une candidature qui reposerait pour partie sur la capitale fédérale, ce qui différerait de la stratégie adoptée pour les JO 2024 et, plus avant, dans la quête des Jeux de l’an 2000.

La déclaration conjointe compilée dans l’accord de coalition se fonde dès lors sur la possibilité de bâtir un projet d’envergure nationale, avec la contribution de plusieurs territoires et villes d’Allemagne, dans un souci évident d’optimisation des sites existants et de maîtrise des coûts.

Sans préciser la moindre échéance visée, l’accord renvoie par ailleurs au DOSB la responsabilité de déterminer – le cas échéant – la faisabilité et l’opportunité d’une nouvelle candidature, et de définir l’édition des Jeux considérée comme pouvant être la plus appropriée.

Ainsi, en tenant compte des prochaines disponibilités offertes par le calendrier des Jeux d’été, le Sénat de Berlin se garderait bien d’avancer l’idée d’une candidature aux JO 2036 qui, ces dernières années, a pu heurter une partie de la classe politique – et sans doute aussi une part de l’opinion publique – face à l’effet miroir des Jeux de 1936 considérés par l’Histoire comme un tremplin à la diffusion de la propagande nazie.

La prudence ainsi affichée s’explique par ailleurs par le souvenir des candidatures allemandes qui ont toutes été écartées à des stades de développement divers au cours des quatre dernières décennies, avec à deux reprises la présence berlinoise.

Slogan de la candidature de Berlin 2024 : « Nous voulons les Jeux » (Crédits – Berlin 2024)

Pour les Jeux d’hiver de 1992, Berchtesgaden avait ainsi porté les couleurs allemandes, mais fut défaite dès le premier tour de scrutin organisée le 17 octobre 1986 au Palais de Beaulieu à Lausanne (Suisse).

La cité des Alpes bavaroises ne décrocha alors que 6 suffrages, contre 7 pour Anchorage (États-Unis) et pour Cortina d’Ampezzo (Italie), 10 pour Falun (Suède) et Lillehammer (Norvège), 19 pour Albertville (France) et 25 pour Sofia (Bulgarie). Au second tour et jusqu’au cinquième et dernier tour, la candidature française se démarqua toutefois pour finalement s’imposer (51 voix) face à Sofia (25) et Falun (9).

Quelques années plus tard, Berlin tenta sa chance pour les Jeux d’été de l’an 2000.

Réunie à Monte-Carlo, le 23 septembre 1993, les membres du Comité International Olympique (CIO) avaient cependant boudé la candidature allemande qui se contenta de 9 voix au premier et au second tour de scrutin, devant Istanbul (Turquie) au premier (7), mais largement en retrait par rapport à Sydney (Australie, 30), Pékin (Chine, 32 puis 37), et Manchester (Royaume-Uni, 11 puis 13). A l’issue de quatre tours, la candidature australienne rafla la mise par deux petites voix d’avance sur la capitale chinoise, avec 45 suffrages récoltés contre 43 pour la prétendante asiatique.

En lieu et place de Berlin, la ville de Leipzig s’essaya à son tour à l’exercice d’une candidature aux Jeux d’été, cette fois pour l’édition de 2012, sans toutefois réussir à dépasser le stade éliminatoire de la requérance, tout comme d’ailleurs Istanbul, La Havane (Cuba), et Rio de Janeiro (Brésil).

Après ces déconvenues, l’Allemagne se tourna à nouveau en direction des Jeux d’hiver, espérant sans doute profiter d’une baisse du nombre de prétendantes sur la ligne de départ. Ainsi, pour 2018 puis pour 2022, Munich enfila le dossard de candidate.

Pour la première échéance, la cité bavaroise s’inclina lors du seul et unique tour de scrutin face à PyeongChang (Corée du Sud), alors grande favorite après deux échecs successifs pour 2010 et 2014. La candidature sud-coréenne remporta ainsi 63 suffrages contre 25 pour Munich et seulement 7 pour Annecy (France).

Pour la seconde échéance, Munich aurait pu être une redoutable candidate à l’échelle internationale et peut-être même une gagnante en puissance si l’issue du référendum organisé le 10 novembre 2013 avait été différente.

Plus récemment, Berlin et Hambourg furent en concurrence active pour obtenir du DOSB les clés d’une candidature aux Jeux d’été de 2024.

Toutefois, l’originalité du projet de la ville portuaire fut un argument déterminant dans le choix effectué à l’unanimité par l’Assemblée Générale extraordinaire du DOSB, le 21 mars 2015. Bien que présentant des plans intéressants pour la régénération d’une partie de la zone portuaire et industrielle, la candidature tarda néanmoins à annoncer le budget prévisionnel d’organisation, ce qui fut un élément majeur dans le rejet populaire exprimé par la voie du référendum au soir du 29 novembre 2015.

Pour l’échéance de 2032 enfin, l’Allemagne tarda sans nul doute à se positionner formellement, bien que la capitale fédérale exprima un temps son intérêt courant 2018, et que la Rhénanie du Nord-Westphalie avança aussi ses pions dans le cadre d’une candidature d’envergure régionale.

De fait, le nouveau processus de désignation du futur hôte adopté par le CIO pour contrer la baisse du nombre de candidatures, et surtout les discussions soutenues de ce dernier avec Brisbane et le Queensland (Australie) ne permirent pas à l’ambition allemande de se déployer à temps.

Vue du parvis et du Stade Olympique de Berlin (Crédits – Site officiel de l’Olympiastadion Berlin)

En retenant les leçons du passé, et en essayant de construire les fondations d’une candidature multi-villes, les autorités sportives et politiques allemandes pourraient in fine proposer un concept cochant la majeure partie des cases et pouvant à l’évidence rivaliser avec la concurrence internationale.

En décembre dernier, en marge de l’Assemblée Générale du DOSB, le Président de la Landessporbund Berlin – ou Association Sportive du Land de Berlin (LDB) – avait en tout cas vanté le principe d’un tel concept.

Comme l’avait notamment résumé Thomas Härtel :

La course entre Berlin, Hambourg, Munich et la Rhénanie du Nord-Westphalie est inutile.

Il nous faut montrer [qu’une candidature] peut se faire de manière durable en ne construisant pas de nouvelles installations sportives, mais en investissant de l’argent dans les équipements existants en les entretenant pour envoyer un signal correspondant au principe de durabilité.

Il faudrait aussi embarquer la population dans cette aventure. Cela ne marche pas sans la participation des municipalités, des territoires et des citoyens.

Quoiqu’il en soit, le chemin est encore long avant de définir ou non une candidature allemande.

Même si les pouvoirs publics ont leur mot à dire sur la question, en particulier pour fournir l’indispensable sécurité financière, le bouton vert demeure entre les mains des autorités sportives et, dans le cas présent, du DOSB.

Douchée par les échecs précédents, l’instance olympique pourrait dès lors se laisser le temps nécessaire avant d’envisager clairement une candidature, tout en engageant un dialogue avec le CIO, conformément à la nouvelle mouture du processus de sélection.

L’année 2023 sera en ce sens déterminante pour le DOSB qui n’entend pas griller les étapes au risque de devoir à nouveau affronter la défaite. L’approche politique aura ainsi son importance, mais encore davantage l’approche populaire à l’heure où l’opinion publique regarde avec plus d’attention les répercussions d’un événement comme les Jeux sur l’environnement, l’emploi, ou l’aménagement urbain.

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