Décès de Jacques Rogge, ancien Président du CIO

Le Comité International Olympique (CIO) a annoncé, ce dimanche 29 août, le décès de son ancien Président, le Belge Jacques Rogge, à l’âge de 79 ans. Ce dernier avait pris la suite de Juan Antonio Samaranch en 2001 pour un mandat achevé en septembre 2013.

Jacques Rogge, Président du Comité International Olympique de 2001 à 2013 (Crédits – IOC / Richard Juilliart)

Si le parcours de Jacques Rogge est intimement lié au CIO, celui qui fut Docteur en médecine, licencié en médecine du sport, et qui exerça en qualité de chirurgien orthopédiste, fut d’abord un passionné de sport, membre de l’équipe national belge de rugby et surtout champion de voile, auréolé de seize titres nationaux et d’un titre mondial.

Au cours de sa carrière, il participa aussi à trois reprises aux Jeux Olympiques, en 1968, 1972 et 1976, dans la classe Finn des compétitions de voile.

A la suite de ses performances sportives, Jacques Rogge se tourna peu à peu vers la gouvernance du sport, devenant Président du Comité Olympique et Interfédéral Belge (COIB) de 1989 à 1992, mais également des Comités Olympiques Européens (EOC) de 1989 à 2001, année où il accéda à la fonction suprême de Président du CIO, dix ans après y avoir fait son entrée.

Mais avant de prendre les commandes de l’imposante institution, Jacques Rogge a gravi les échelons un à un, devenant successivement Président de la Commission de Coordination des Jeux de Sydney 2000, puis Président de la Commission de Coordination des Jeux d’Athènes 2004, avec en parallèle, l’exercice des fonctions de membre de Commissions, ainsi que de représentant du CIO au Conseil de Fondation de l’Agence Mondial Antidopage (AMA) durant deux ans, entre 1999 et 2001, sans oublier bien sûr le rôle-clé de membre de la Commission Exécutive dès 1998 et jusqu’à son départ de la présidence en 2013.

Cette année-là, Jacques Rogge fut nommé Président d’honneur du CIO et, quelques mois plus tard, Envoyé spécial du Secrétaire Général des Nations Unies pour les jeunes réfugiés et le sport (2014-2018).

Jacques Rogge, alors Président du Comité International Olympique, en visite au Centre Aquatique Olympique de Londres, un an avant l’ouverture des Jeux de Londres 2012 (Crédits – IOC / Ian Jones)

En retrait depuis plusieurs années, l’ancien leader demeurait néanmoins une figure respectée du Mouvement Olympique.

Huitième Président du CIO, Jacques Rogge avait, en 2001, pris les clés de la puissante maison olympique après le long règne de l’Espagnol Juan Antonio Samaranch, un règne marqué par le développement accru des Jeux Olympiques et de l’économie liée à cet événement-phare, mais aussi par les scandales, à commencer par les conditions d’attribution des Jeux de Salt Lake City 2002 qui avaient provoqué d’importants remous du côté de Lausanne (Suisse), Capitale olympique.

Bien que le défi de la rénovation du modèle olympique s’est avéré un casse-tête, que son successeur, Thomas Bach, a repris à bras le corps avec l’adoption de profondes réformes depuis 2013Agenda 2020, Nouvelle Norme, Agenda 2020+5 – Jacques Rogge n’en a pas moins été un Président majeur, essayant, durant ses deux mandats, de faire entrer le CIO dans une ère nouvelle, tâchant dès lors d’apporter autant que possible nouveautés et innovation au sein de l’institution centenaire.

Encore davantage que pour Thomas Bach, la mission de Jacques Rogge devait d’ailleurs composer avec la structuration même du CIO, façonné durant plus de vingt ans par Juan Antonio Samaranch, tant au niveau de la gouvernance que du choix des membres actifs. Pas forcément le meilleur héritage pour garantir la modernisation pourtant attendue.

Ayant été Président du CIO lors des Jeux de Salt Lake City 2002, d’Athènes 2004, de Turin 2006 et de Pékin 2008 – pour lesquels son prédécesseur fut un acteur-clé, surtout pour la dernière échéance citée qu’il encouragea vivement – Jacques Rogge a par la suite été au premier plan pour dévoiler les Villes Hôtes des Jeux de 2010 (Vancouver), 2012 (Londres), 2014 (Sotchi), 2016 (Rio de Janeiro), 2018 (PyeongChang) et 2020 (Tokyo).

Si les Jeux d’hiver de 2014 ont laissé un goût amer à plus d’un titre, entre l’organisation dispendieuse de l’événement et la révélation du scandale de dopage russe au cours des dernières années, l’échéance de 2012 a été au contraire une réussite aux multiples facettes, avec l’héritage encore vif des Jeux londoniens, qui ont permis de régénérer l’ancien quartier industriel de l’East End, et qui ont contribué à insuffler une dynamique pour la performance des athlètes britanniques.

Pour les Jeux de 2016, le désir de Jacques Rogge et du CIO d’ouvrir les Jeux à un nouveau territoire, avec une première historique pour l’Amérique du Sud, s’est peu à peu transformé en fiasco, avec d’importants retards dans les préparatifs et une gestion de l’après-JO rappelant le souvenir douloureux de l’édition grecque de 2004.

Avec Tokyo 2020, l’institution s’était finalement donnée une certaine bouffée d’oxygène, accordant ainsi sa confiance à une ville et un pays connus et reconnus pour leur savoir-faire et leur rigueur organisationnel et ce, bien avant que l’épidémie de Covid-19 ne vienne perturber les plans initiaux.

Mais au-delà des échéances olympiques qu’il aura accompagné ou supervisé en qualité de Président du CIO, la grande réussite de Jacques Rogge est sans conteste l’installation des Jeux Olympiques de la Jeunesse (JOJ) en 2007.

Instigateur de cette révolution, Jacques Rogge avait en effet souhaité assurer un développement accru du sport chez les jeunes dans une société marquée par la sédentarité, en ouvrant en outre le rêve olympique à davantage de territoires à travers le monde, et en proposant ces Jeux comme un véritable laboratoire pour l’émergence de nouvelles disciplines olympiques.

Depuis 2010, et l’édition inaugurale de Singapour, les JOJ ont ainsi été une source d’inspiration pour le CIO désireux de reproduire – au moins en partie – l’organisation simplifiée de l’événement olympique.

Aujourd’hui, l’essor des sports urbains inscrits au programme des Jeux de Tokyo 2020 et prochainement de Paris 2024 doit beaucoup à ces JOJ. Ces derniers ont aussi eu un impact évident sur l’ouverture à la jeunesse, au travers des disciplines nouvelles et d’une communication adaptée aux nouvelles technologies, sans négliger par ailleurs le développement d’une scénographie remodelée pour la célébration de la manifestation olympique.

L’idée de Buenos Aires 2018, avec sa Cérémonie d’ouverture en cœur de ville, a de fait été reprise par Paris 2024, qui prépare une ouverture sur la Seine et le long des berges du fleuve, ainsi que par Los Angeles 2028, qui planifie la tenue des Cérémonies entre le Memorial Coliseum et le SoFi Stadium.

Thomas Bach et Jacques Rogge, le 10 septembre 2013 à Buenos Aires, Argentine (Crédits – IOC / Richard Juilliart)

Comme l’a exprimé Thomas Bach, qui fut le bras droit de Jacques Rogge durant la présidence de celui-ci :

Jacques était avant tout un passionné de sport qui aimait être au contact des athlètes, une passion qu’il a transmise à tous ceux qui l’ont connu. Sa joie dans le sport était communicative.

Ce fut un Président accompli, qui contribua à moderniser et à transformer le CIO. Il restera tout particulièrement dans les mémoires pour avoir encouragé la pratique du sport chez les jeunes et avoir créé les Jeux Olympiques de la Jeunesse. Ce fut également un fervent défenseur du sport propre et il lutta sans relâche contre le fléau du dopage.

Comme nous avons été élus ensemble membres du CIO, nous avons partagé un merveilleux lien d’amitié, qui s’est poursuivi jusqu’à ses derniers jours, alors que le Mouvement Olympique tout entier et moi-même pouvions encore bénéficier de sa contribution, notamment au sein du Conseil de la Fondation Olympique pour la Culture et le Patrimoine.

En signe de respect, le drapeau olympique sera mis en berne pendant cinq jours au-devant de la Maison Olympique, siège du CIO, du Musée Olympique et de l’ensemble des bâtiments de l’organisation.

Le CIO a par ailleurs fait savoir dans son communiqué qu’un service commémoratif public se tiendra plus tard dans l’année et ce, alors que la cérémonie d’obsèques sera célébrée en privé autour de la famille de Jacques Rogge, son épouse, Anne, son fils, sa fille, et ses deux petits-enfants.