JO 2032 : Les clés de la réussite du Queensland

Quasiment assuré d’obtenir l’organisation des Jeux d’été de 2032, le Queensland va désormais poursuivre ses efforts dans le but d’affiner son concept et ce, en s’engageant dans la phase dite de dialogue ciblé avec le Comité International Olympique (CIO).

(Crédits – Australian Olympic Committee)

Deux ans après la réalisation d’une étude d’opportunité et de faisabilité à l’initiative des élus locaux, la candidature australienne du Queensland est aujourd’hui en bonne voie de décrocher les Jeux de 2032, succédant ainsi à Paris 2024 et à Los Angeles 2028.

Ce succès – encore en chantier – doit beaucoup à l’implication de John Coates, Président du Comité Olympique de l’Australie (AOC) et membre influent du CIO, ainsi qu’à l’engagement des pouvoirs publics et à l’adhésion populaire dans la région de Brisbane et dans l’ensemble du pays. Ce triptyque a conféré une force qui s’est avérée déterminante aux yeux de la Commission de Futur Hôte instaurée par le CIO pour accompagner les candidatures et recommander in fine l’une d’elles, le Queensland en l’occurrence.

Dans son rapport, mis en ligne mercredi 24 février, ladite Commission a d’ailleurs listé les atouts d’un projet reposant sur un concept de 80 à 90% de sites existants ou temporaires. Outre le nombre et la qualité des infrastructures, la Commission de Futur Hôte s’est attardée aussi sur l’engagement des pouvoirs publics comme étant l’un des éléments-clés de la solidité et de la crédibilité du projet australien.

Cet engagement s’est néanmoins construit de manière progressive au cours des deux années écoulées, chacun gardant à l’esprit les risques d’une course aux Jeux incertaine, dont l’issue peut s’avérer problématique au regard des dépenses à prévoir et à gérer dans le cadre des préparatifs.

John Coates, Président du Comité Olympique Australien (AOC), et Annastacia Palaszczuk, Première Ministre du Queensland (Crédits – Australian Olympic Committee)

Aussi, la Première Ministre du Queensland a d’abord joué la montre pour réfléchir à l’opportunité de présenter une candidature avec, à l’été 2019, une déclaration pour rappeler les fondements sur lesquels devait, selon elle, se structurer un éventuel projet.

Comme l’avait à l’époque affirmé Annastacia Palaszczuk :

Je peux vous confirmer que nous allons mettre en place un Groupe de Travail pour évaluer la proposition de candidature pour les Jeux Olympiques et Paralympiques d’été de 2032. J’ai immédiatement appeler John Coates pour l’informer de cette décision.

Comme nous l’avons fait pour les Jeux du Commonwealth, il nous faudra inclure les villes et les territoires régionaux. A l’époque, le CIO avait été absolument impressionné par le fait que nous ayons organisé un tel événement de classe mondiale à l’échelle régionale, ce qui nous donne un certain avantage.

Le projet olympique et paralympique doit être partagé entre les différents territoires, tout comme les coûts. Le projet doit également bénéficier d’un soutien de tous les niveaux institutionnels.

Nous avons besoin de tout le monde à bord.

Par la suite, la Première Ministre du Queensland s’était pleinement engagée derrière la candidature, après une visite au siège du CIO et la publication des conclusions d’une étude technique souhaitée en complément des travaux réalisés par le South-East Queensland Council of Mayors, qui avaient déjà apporté des éclaircissements quant au modèle économique et à la localisation des sites.

En plus de ce soutien local, prérequis à toute idée de candidature, le projet a aussi pu bénéficier de l’appui institutionnel indispensable du gouvernement fédéral dirigé depuis 2018 par Scott Morrison, qui a récemment réitéré son engagement au cours d’un entretien avec le Président du CIO en personne, Thomas Bach.

Mais alors que le soutien à trois niveaux a immanquablement pesé dans la balance de la Commission de Futur Hôte pour recommander le projet du Queensland auprès de la Commission Exécutive du CIO, la stabilité politique incarnée par la réélection de la Première Ministre du Queensland et celle du Chef du gouvernement australien, a également permis d’accroître les forces d’un dispositif qui devra compter sur les moyens logistiques des pouvoirs publics pour conforter la mise en œuvre des Jeux en 2032, en particulier sur le plan de la sécurité.

Sur ce point, la Commission de Futur Hôte a d’ailleurs souligné dans son rapport, prenant exemple sur le succès des Jeux du Commonwealth organisés en 2018 et sur les Jeux d’été de Sydney 2000 :

Si la sécurité des Jeux est déclarée ‘hautement prioritaire’ par les autorités gouvernementales, l’Australie est bien équipée pour garantir une célébration sûre, sécurisée et pacifique des Jeux.

Cartographie du concept de Brisbane et du Queensland pour les Jeux d’été de 2032 (Crédits – Rapport de faisabilité de la Commission de Futur Hôte des Jeux d’été)

Au-delà de l’engagement des pouvoirs publics derrière le projet olympique et paralympique, la candidature du Queensland s’est aussi distinguée par un certain engouement populaire, ce qui a pu rassurer une institution olympique confrontée à des référendums et à des oppositions notables dans plusieurs Villes Candidates ces dernières années, sans compter les projets otages de considérations politiques.

Rien que pour l’édition des JO 2024 par exemple, Boston (États-Unis), Hambourg (Allemagne), Rome (Italie) et Budapest (Hongrie) s’étaient retrouvées dans d’inconfortables positions en raison de franches oppositions populaires ou politiques qui avaient alors su utiliser à souhait les réseaux sociaux.

Du côté du Queensland et de l’Australie, l’absence de référendums préalables au dépôt d’une candidature de cette envergure – à l’inverse d’autres pays où des consultations sont mêmes obligatoires – a donc été de nature à séduire le CIO, d’autant plus si l’on considère l’apport complémentaire des chiffres issus du sondage commandé par l’institution auprès de Publicis Sport & Entertainment en janvier 2021.

De fait, pas moins de 66% des Australiens se déclarent favorables à la tenue des Jeux dans leur pays, alors que 11% se disent opposés à une telle perspective et que 20% ne se déclarent ni favorables ni opposés aux Jeux.

Dans le même temps, 66% des habitants de Brisbane, ville-centre du Queensland, se sont prononcés pour l’organisation des Jeux de 2032. Un taux d’adhésion légèrement au-dessus de la moyenne relevée ailleurs dans le Queensland (64%) et quelque peu inférieur au positionnement des habitants dans les autres territoires de l’Australie (68% et seulement 7% d’opinions défavorables).

Vue du Brisbane Cricket Ground, également dénommé Gabba (Crédits – The Gabba)

Bien sûr, malgré les bons points de la candidature du Queensland pour 2032, des problématiques restent en suspens et devront rapidement être tranchées, dans le cadre des discussions approfondies qui s’engagent à présent entre le CIO et les autorités australiennes.

La question du Stade Olympique et celle portant sur l’aménagement d’éventuels nouveaux sites sportifs pérennes ont ainsi été ouvertement posées par la Commission de Futur Hôte au travers du rapport publié par cette dernière.

Aussi, pour l’instance olympique, le projet pourrait se rapprocher au maximum d’un concept à 90% de sites existants ou temporaires en optimisant autant que possible la cartographie actuellement proposée par les porteurs de la candidature.

Cela pourrait dès lors conduire à l’abandon du projet de Stade Olympique flambant neuf de 50 000 places au profit d’une ou deux enceintes déjà bâties et opérationnelles. La Commission préconise par exemple l’utilisation du Carrara Stadium de Gold Coast pour les épreuves d’athlétisme (40 000 places), tandis que le Gabba pourrait être dévolu aux Cérémonies d’ouverture et de clôture avec une jauge équivalente.

Nul doute en tout cas que les échanges devraient aboutir à trouver des solutions pour le Stade Olympique et pour la poignée de sites dont le CIO ne juge pas utile l’édification, surtout si l’on considère la présence de l’influent John Coates au sein de la candidature.

Depuis de nombreuses années, celui qui occupe les fonctions de Président de la Commission de Coordination des Jeux de Tokyo 2020, a contribué à forger le projet quasi-lauréat, militant clairement en faveur d’une candidature australienne afin de réaffirmer l’attachement du pays aux valeurs olympiques, après la tenue des Jeux à Melbourne en 1956 et à Sydney pour l’édition de l’an 2000.

Président de l’AOC, John Coates, qui est un proche de Thomas Bach, a pour cela multiplié les déclarations et les appels du pied pour accompagner le développement d’un tel projet qui aurait toutefois pu voir le jour bien plus tôt.

Pour preuve, candidate malheureuse pour les JO 1992, Brisbane avait dans un passé récent été évoquée pour cibler l’échéance de 2028, avant que la course aux Jeux de 2024, désorganisée par le retrait de plusieurs projets comme indiqué précédemment, ne se transforme en double désignation de Paris et de Los Angeles.

Malgré tout, la détermination de l’homme fort de l’AOC est restée intacte, John Coates voyant même dans l’adoption d’une nouvelle procédure de candidature, qu’il a façonné durant l’année 2019, une chance de réveiller l’appétit de l’Australie.

Thomas Bach, Président du CIO et John Coates, Président du Comité Olympique d’Australie et membre du CIO (Crédits – CIO / Greg Martin)

Pour les poursuivantes, la course aux Jeux de 2032 devrait s’arrêter prochainement, sauf à imaginer un revirement de situation. La phase de dialogue ciblé engagée par le CIO avec le Queensland s’apparente ni plus ni moins à une négociation exclusive entre les deux parties pour parvenir, dans un délai plus ou moins court, à l’officialisation d’un concept pour 2032.

En d’autres termes, bien qu’existantes, les autres candidatures devront in fine se contenter – au mieux – de discussions pour l’édition estivale suivante, à savoir 2036.

Sur ce point, le CIO va certainement tenter de conserver un maximum de liens avec lesdites candidatures, la nouvelle approche de dialogue instaurée à l’égard de ces dernières par l’institution de Lausanne (Suisse) ayant soulevé un intérêt aux quatre coins de la planète.

Au-delà de Brisbane et du Queensland dans son ensemble, le CIO a en effet pu relever une dynamique – constante – en provenance de l’Asie et du Moyen-Orient, avec les déclarations d’intention plus ou moins affirmées de l’Inde, de l’Indonésie, mais également de la Chine et du Qatar, sans oublier aussi un temps, l’idée d’une candidature commune de la Corée du Nord et de la Corée du Sud.

Du côté européen, la Rhénanie du Nord-Westphalie a pris le relais de la candidature avortée de Hambourg 2024 pour replacer l’Allemagne sur le devant de la scène olympique, tandis que le Comité Olympique de Hongrie a récemment évoqué la perspective d’un nouveau projet focalisé sur Budapest.

D’autres projets moins aboutis furent en outre évoqués au cours des dernières années, notamment au niveau de l’Argentine avec Buenos Aires, de l’Espagne avec Madrid, des Pays-Bas autour d’un projet national, ou encore de la Turquie avec Istanbul et, dernièrement, du Canada avec une candidature bicéphale Montréal-Toronto.