Paris 2024 : Le temps des changements

Entre l’achèvement des élections municipales, l’installation annoncée d’un nouveau Gouvernement et la nécessité de réviser le projet de Paris 2024 à l’aune de la crise économique liée au Covid-19, les préparatifs d’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 entrent dans une nouvelle ère.

(Crédits – Philippe Millereau / KMSP / CNOSF)

En début de semaine prochaine tout au plus, la France connaîtra les visages des personnalités qui composeront l’équipe gouvernementale qui sera pilotée par Jean Castex, nommé ce vendredi 03 juillet en remplacement d’Édouard Philippe.

Si le nom de Jean Castex – jusqu’alors Délégué Interministériel pour les Jeux de 2024 – revenait régulièrement pour l’obtention d’un portefeuille ministériel, le choix de lui confier les clés de l’Hôtel de Matignon n’était pas forcément une évidence et ce, même si son sérieux a pu être salué par ses différents interlocuteurs dans les missions successives qui lui ont été confiées.

Avec une telle personnalité comme Chef du Gouvernement, Paris 2024 devrait indéniablement pouvoir compter sur un allié de poids, Jean Castex étant déjà bien connu des acteurs du projet olympique et paralympique, que ce soit au niveau du Comité d’Organisation (COJO) – pour lequel Tony Estanguet, Président, s’est exprimé hier sur Twitter – mais également au sein de la Ville de Paris, du Conseil Départemental de la Seine-Saint-Denis ou encore de la Région Île-de-France et de la Métropole du Grand Paris.

Mais outre le nouveau Premier Ministre, le COJO attend aussi de savoir qui sera le prochain locataire du Ministère des Sports, avec ou sans périmètre restreint et avec ou sans Roxana Maracineanu en fonction à ce poste depuis septembre 2018. Le COJO et l’ensemble des acteurs du projet attendent par ailleurs de connaître l’identité du futur Délégué Interministériel chargé des Jeux, un poste des plus stratégiques à maintenant quatre ans presque jour pour jour de l’ouverture des Jeux de 2024.

(Crédits – Henri Garat / Ville de Paris)

D’ores et déjà en tout cas, Paris 2024 peut compter sur la réélection d’Anne Hidalgo à la Mairie de Paris.

Acquise dimanche soir à l’issue du second tour des élections municipales, cette réélection a officiellement été entérinée ce vendredi avec l’installation du Conseil de Paris et la désignation des nouveaux adjoints, parmi lesquels Pierre Rabadan.

Jusqu’alors Conseiller aux Sports de la Maire de Paris, cet ancien rugbyman âgé de 40 ans accède aujourd’hui au rang d’Adjoint en charge des Sports et des Jeux Olympiques et Paralympiques, succédant ainsi à Jean-François Martins désireux de retourner dans le secteur privé après son expérience à l’Hôtel de Ville.

Au-delà de Paris, le scrutin municipal a aussi permis de conforter ou de renouveler les équipes dirigeantes dans les villes qui accueilleront les épreuves olympiques et paralympiques en 2024.

Pour la Seine-Saint-Denis, élément majeur du dispositif des Jeux, les résultats électoraux étaient d’ailleurs particulièrement attendus voire redoutés en cas de basculement de villes dans le giron d’opposants aux Jeux.

Finalement, la cartographie post-28 juin conforte le projet de Paris 2024 avec des Maires sortants réélus ou de nouveaux venus issus de formations politiques favorables à la tenue de la manifestation planétaire, à l’instar de Mathieu Hanotin (PS) victorieux du sortant Laurent Russier (PCF) à Saint-Denis, mais également de Karim Bouamrane (PS) face au Maire défait William Delannoy (UDI) à Saint-Ouen, et de Mohamed Gnabaly (Divers Gauche) reconduit dans sa mission à L’Île-Saint-Denis, ces trois villes étant appelées à abriter le Village des Athlètes dès 2024.

(Crédits – Mathieu Hanotin / Page officielle Facebook)

En amont des échéances futures pour le territoire – notamment les élections départementales et régionales – deux autres scrutins à venir seront déterminants pour la suite des préparatifs à mener dans le cadre des Jeux.

Du fait de son retrait de la scène politique locale, Patrick Braouezec (PCF) va en effet transmettre les commandes de l’Établissement Public Territorial de Plaine Commune dans les prochains jours, sans doute à Mathieu Hanotin, qui bénéficie d’un rapport de force favorable et qui ne fait pas mystère de ses ambitions pour cet organe institutionnel majeur pour l’aménagement des sites et la coordination des préparatifs des Jeux en Seine-Saint-Denis. Le renouvellement des sièges de la Métropole du Grand Paris – maître d’œuvre du Centre Aquatique Olympique – sera aussi scruté.

Du côté des autres territoires appelés à accueillir des épreuves en 2024, de grands bouleversements ne sont pas attendus, à l’exception peut-être de Marseille où l’incertitude plane sur l’identité du nouveau Maire et sur la stabilité du futur Conseil Municipal alors que la Cité Phocéenne est programmée pour recevoir les compétitions de voile et une partie du tournoi olympique de football.

Cartographie des sites olympiques de Paris 2024 (Crédits – Paris 2024)

Mais outre les enjeux électoraux, les préparatifs de Paris 2024 vont aujourd’hui devoir s’adapter aux répercussions de la crise et une modulation du concept n’est pas à exclure, même si les notions-clés des Jeux chères à Tony Estanguet et à ses équipes devraient être préservées.

Pour faire face à une baisse éventuelle des revenus issus du marketing – le Programme des Sponsors étant toujours espéré à 1,2 milliard d’euros – Paris 2024 table ainsi, depuis maintenant plusieurs semaines, sur des pistes de réflexion afin d’envisager une réduction de la voilure sur certains postes, dans le décorum voire au-delà.

Dans un article mis en ligne hier après-midi, « Le Parisien » faisait en ce sens état de possibles coupes dans le programme prévu pour la Seine-Saint-Denis au risque de soulever la vive contestation des élus locaux et de la Maire de Paris, fidèle soutien de ses voisins. Il faut dire que le département a déjà connu quelques ajustements par rapport aux engagements initiaux, à l’image du badminton finalement délocalisé du Bourget jusqu’à la future Aréna de la Porte de la Chapelle (Paris 18e) ou du volley-ball assis transféré du Bourget également jusqu’au Stade Roland Garros (Paris 16e).

Quoiqu’il en soit, une nouvelle revue de projet devra se faire en lien avec le Comité International Olympique (CIO), le Comité International Paralympique (IPC), les Fédérations Internationales (FI), sans oublier bien sûr les Collectivités engagées dans la mise en œuvre du projet de Paris 2024.

Si l’argument du retard dans l’aménagement et la livraison des lignes 16 et 17 du Grand Paris Express a pu être évoqué à demi-mot pour justifier un réexamen du projet pour la Seine-Saint-Denis, nul doute que les discussions donneront lieu à une âpre négociation entre les protagonistes pour les mois à venir et ce, alors que le Président du CIO est annoncé en visite dans la capitale française, les 08 et 09 juillet prochains.

Le Président de la République, Emmanuel Macron, et le Président du Comité International Olympique, Thomas Bach, vendredi 07 juin 2019 (Crédits – CIO / Greg Martin)

Durant ce séjour dans la Ville Lumière, Thomas Bach devrait en toute logique s’entretenir avec le Président du COJO, Tony Estanguet et une partie des directeurs de Paris 2024. Il devrait aussi – même si aucune information officielle n’a été confirmée à ce jour – rencontrer le Président de la République, Emmanuel Macron, et peut-être la Maire de Paris, Anne Hidalgo, dont il a salué la réélection cette semaine.

Pour le Président du CIO, l’enjeu est double : rassurer d’une part les acteurs de Paris 2024 alors que l’institution gère actuellement le report des Jeux de Tokyo 2020, et encourager la poursuite des efforts en direction d’un modèle de Jeux plus économe et plus vertueux.