Le CIO énonce des recommandations et retire l’Ordre olympique à Vladimir Poutine

Encore prudent quant à la position à adopter dans le contexte de la crise ukrainienne, le Comité International Olympique (CIO) recommande aujourd’hui de ne pas autoriser la participation d’athlètes et d’officiels russes et biélorusses, tout en actant par ailleurs le retrait de l’Ordre olympique décerné à trois personnalités russes, parmi lesquelles le Président Vladimir Poutine.

Vue de la Maison Olympique, siège du CIO à Lausanne, Suisse (Crédits – IOC / Greg Martin)

Après la crise sanitaire liée au Covid-19 qui a largement perturbé les préparatifs de Tokyo 2020, puis de Pékin 2022, l’institution olympique est aujourd’hui confrontée à un nouveau défi, et non des moindres.

Alors que la crise ukrainienne a fait valser la doctrine habituelle de l’apolitisme du monde sportif, avec l’adoption par les Fédérations Internationales (FI) de mesures de restrictions ou d’exclusions pour les compétitions prévues en Russie et pour les athlètes russes, le CIO est resté jusqu’à présent relativement prudent, donnant même l’impression de se défausser de ses responsabilités.

Aussi, après deux communiqués au travers desquels l’institution a ouvertement condamné la violation manifeste de la Trêve Olympique par les autorités russes et leurs alliés de Biélorussie, le CIO a aujourd’hui publié un troisième communiqué montrant un haussement de ton, même si les actions recommandées incombent encore au premier chef aux Fédérations Internationales.

Dans sa nouvelle publication, l’institution de Lausanne (Suisse) rappelle notamment que :

Le Mouvement Olympique est […] uni par son sens de l’équité qui lui interdit de punir des athlètes pour des décisions prises par leur gouvernement si ces derniers n’y participent pas activement.

Nous sommes attachés à des compétitions équitables pour tous, sans discrimination d’aucune sorte. La guerre qui fait rage actuellement en Ukraine place toutefois le Mouvement Olympique face à un dilemme.

Alors que des athlètes russes et bélarussiens peuvent continuer à prendre part à des événements sportifs, de nombreux athlètes ukrainiens sont dans l’impossibilité de le faire en raison des attaques menées contre leur pays.

Thomas Bach, Président du CIO, lors de la Cérémonie de clôture des Jeux Olympiques d’hiver de Pékin 2022, le 20 février 2022 (Crédits – IOC / Greg Martin)

Concrètement, et face à ce constat, la Commission Exécutive de l’institution présidée par Thomas Bach, a émis ce lundi une résolution en six points, dont la moitié concerne directement les FI.

Dans le détail, le CIO recommande aux Fédérations de sports et aux organisateurs d’événements sportifs de ne pas inviter et de ne pas autoriser la participation d’athlètes et la présence d’officiels russes et biélorusses dans le cadre des compétitions internationales. Sous la pression, au regard de la tiédeur des mesures prises ce week-end, la FIFA a par exemple annoncé ce lundi l’exclusion de la Russie de la Coupe du Monde de football qui se déroulera au cours du second semestre 2022 au Qatar.

Conscient cependant de la difficulté de mettre en œuvre une telle mesure dans un calendrier sportif potentiellement restreint, le CIO propose une solution alternative lorsque la participation d’athlètes ou d’officiels ne peut être empêchée, pour des critères d’organisation ou pour des raisons juridiques. Dans ce cas de figure, la Commission Exécutive encourage les Fédérations à ne pas autoriser l’usage de la dénomination de Russie ou de Biélorussie par les athlètes et les officiels présents et ce, afin de privilégier la mise en place d’équipes neutres. De même, le CIO milite pour l’absence de symbole, de drapeau et d’hymne national pour les deux pays précités.

Dans le prolongement, la Commission Exécutive maintient sa recommandation-phare issue de sa précédente prise de parole à destination des Fédérations Internationales, à savoir l’absence d’événements sportifs sur le territoire russe et biélorusse. Cela se traduit d’ores et déjà par le retrait ou l’annulation d’événements, comme la finale de la Ligue des Champions de l’UEFA qui devait avoir lieu le 28 mai prochain à Saint-Péterbourg et qui se tiendra finalement au Stade de France.

Au-delà de cette série de recommandations, la Commission Exécutive a aussi profité de sa réunion du jour pour saluer les appels à la paix lancés et véhiculés – notamment sur les réseaux sociaux – par les athlètes et les dirigeants sportifs à travers le monde. L’instance olympique a par ailleurs réaffirmé son soutien à l’égard de la communauté olympique ukrainienne avec la mise en place d’un fond ds de solidarité et ce, à désormais quatre jours de la Cérémonie d’ouverture des Jeux Paralympiques de Pékin 2022.

Enfin – et il s’agit sans doute là de la prise de position la plus ferme actée par le CIO, en son nom, depuis le début de l’offensive russe en Ukraine – la Commission Exécutive a fait savoir qu’elle retirait l’Ordre olympique à trois personnalités qui occupent instamment une fonction importante au sein du gouvernement de la Fédération de Russie ou un poste de haut rang.

Dmitry Chernyshenko, Président du Comité d’Organisation des Jeux d’hiver de Sotchi 2014, montrant au Président de la Fédération de Russie, Vladimir Poutine, un exemplaire de la torche olympique, sous le regard du Président du CIO de l’époque, Jacques Rogge, le 30 mai 2013 (Crédits – IOC / Richard Juilliart)

Décoré dès 2001, le Président Vladimir Poutine est la première et principale personnalité ciblée. Le Premier Ministre adjoint, et Président du Comité d’Organisation des Jeux d’hiver de Sotchi 2014, Dmitry Chernyshenko, est lui-aussi visé par cette mesure, tout comme le Chef d’État-major adjoint du Bureau exécutif présidentiel, Dmitry Kozak.

Malgré ces nouvelles annonces, il demeure que le CIO n’a pas engagé de mesures concernant la participation ou non de la Russie et de la Biélorussie pour les Jeux de l’Olympiade de Paris 2024. Or, et faut-il une fois de plus le rappeler, en d’autres temps, l’institution olympique avait pris la décision d’exclure purement et simplement l’Allemagne des Jeux de 1920, 1924 et 1948, à la suite des actions du pays lors des deux conflits mondiaux. Il en fut de même pour le Japon concernant les Jeux de 1948.

A l’instar de la FIFA, avec le prochain Mondial de football, le CIO pourrait néanmoins se retrouver dans une situation difficilement tenable dans les jours ou semaines à venir. Après le temps de la prudence et des recommandations, le temps des sanctions fermes pourrait dès lors survenir.