JO 2030 : Le projet hivernal Pyrénées-Barcelone relancé

Placé en suspens au cours des derniers mois, en raison de l’épidémie de Covid-19, le projet espagnol d’une candidature olympique et paralympique pour les Jeux d’hiver de 2030 refait aujourd’hui surface.

Vue des équipements de la colline de Montjuïc à Barcelone (Crédits – Barcelona / Official Website)

Le Comité Olympique Espagnol (COE) devait initialement déposer la candidature de Pyrénées-Barcelone aux Jeux d’hiver de 2030, l’an passé. Néanmoins, la recrudescence de la crise sanitaire liée au Covid-19 et l’engagement des pouvoirs publics à mener la lutte contre l’épidémie, ont par la suite conduit les autorités sportives à revoir leur plan.

Aujourd’hui, alors que les Jeux d’été de Tokyo 2020 sont sur le point de s’ouvrir à huis clos, le Président du COE a annoncé au quotidien sportif « Mundo Deportivo » avoir réceptionné les lettres d’intention des leaders des Collectivités associées au projet, à savoir la Catalogne et l’Aragon, ainsi que celle du Premier Ministre espagnol.

Une étape capitale en vue de finaliser un projet déjà évoqué pour les Jeux de 2022, puis un temps, pour l’échéance 2026.

En cette fin de semaine, Alejandro Blanco a ainsi adressé – comme le veut l’usage – les lettres officielles de Pedro Sánchez pour le gouvernement espagnol, Pere Aragonès de la Généralité de Catalogne, et Javier Lambán pour la Communauté autonome d’Aragon, au siège du Comité International Olympique (CIO). Dans le même temps, le chef de file du Mouvement Olympique espagnol se prépare à présenter une copie de ces missives, accompagnée de la sienne, au Président de l’institution de Lausanne (Suisse) avec qui il s’entretiendra la semaine prochaine, en marge de la 138ème Session du CIO.

Alejandro Blanco, Président du Comité Olympique Espagnol (Crédits – COE)

A Tokyo, Alejandro Blanco aura dès lors l’opportunité de réaffirmer face à Thomas Bach, la détermination de l’Espagne à soumettre un projet hivernal et ce, après avoir accueilli avec succès les Jeux d’été en 1992 et avoir tenté à plusieurs reprises de renouer avec l’esprit olympique au travers des candidatures infructueuses de Madrid pour les JO 2012, 2016 et 2020.

Mais pour réussir à concrétiser ce rêve des Jeux d’hiver, le COE devra concilier les intérêts des acteurs institutionnels, avec une répartition la plus homogène possible des sites et des futurs pôles de compétitions.

Alejandro Blanco ne s’y est d’ailleurs pas trompé, en affirmant :

Ce qu’il faut faire désormais, c’est de continuer à travailler sur la partie technique avec le CIO, avant de pouvoir présenter le projet final à une date qui n’a pas encore été fixée.

Je tiens à souligner qu’il est très important que nous allions tous main dans la main auprès du CIO et que lorsque nous considérerons que le projet est bien ficelé, le temps sera venu de le présenter.

Sur ce point, l’Espagne pourra retenir la leçon de l’Italie qui pour 2026, après quelques mois de flottements, entre les incertitudes de Milan et de Turin et les pressions gouvernementales, est parvenue à faire émerger un projet basé sur plusieurs régions du pays. Avec le succès final que l’on connaît.

Pour preuve des tensions qui pourraient survenir au fur et à mesure de la structuration du projet espagnol, le Président de l’Aragon a déjà esquissé une critique à l’égard de son homologue de Catalogne, reprochant à ce dernier de n’avoir pas fait mention de l’Aragon dans sa lettre transmise au Président du COE et in fine, au CIO…

Percevant sans doute ce risque de scission, Juan Antonio Samaranch Jr., fils de l’ancien Président du CIO et acteur-clé au sein de l’institution olympique, a lui-aussi mis en garde les dirigeants politiques amenés à être parties au projet.

Comme il l’avait ainsi déclaré dès la fin d’année 2020 :

Il est essentiel que pour que la candidature de Pyrénées-Barcelone puisse avoir lieu, il doit y avoir une entente parmi les administrations publiques.

S’il n’y a pas d’accord public fiable, solide et puissant – entre le gouvernement central, celui d’Aragon, de la Généralité de Catalogne, le Conseil Municipal, le Conseil Provincial – mieux vaut ne pas aller de l’avant.

Ce doit être le projet de tout le monde ou de personne ; un projet pour la jeunesse et pour la société accepté comme celui de Barcelone 1992. Sinon, cela ne vaut pas la peine de continuer.

(Crédits – Pirineus-Barcelona)

Sur le fond, le projet porté par l’Espagne pourrait s’avérer intéressant, en s’articulant autour de deux pôles majeurs, à savoir Barcelone pour les sports de glace et les Cérémonies d’ouverture et de clôture, et les Pyrénées pour les sports de neige.

Une répartition semble à ce que finalise actuellement Pékin (Chine) dans l’optique des Jeux d’hiver qui se dérouleront en février et mars 2022 entre des infrastructures héritées des Jeux d’été de 2008 et les nouveaux équipements aménagés dans les zones montagneuses de Zhangjiakou et Yanqing.

Un projet également semblable à ce qui a pu être fait du côté de Sotchi (Russie) pour l’édition hivernale de 2014, ou encore à la proposition formulée devant le Comité National Olympique et Sportif Français (CNOSF) par Nice, dans la perspective d’une candidature aux JO 2018, entre sites présents sur le littoral azuréen et installations sportives dans l’arrière-pays.

Pour Barcelone, l’atout-maître résidera en tout cas dans l’existence d’un certain nombre d’équipements structurants, directement hérités des Jeux de 1992 ou édifiés depuis cette date qui a incontestablement changé le visage de la cité catalane, en ouvrant cette dernière sur la Méditerranée – avec les transformations d’envergure du front de mer – et sur l’Europe.

Dans le cadre du projet de candidature développé pour les JO 2022, Barcelone avait ainsi envisagé la mobilisation du Stade Olympique de la colline de Montjuïc pour l’accueil des Cérémonies. Le projet avait par ailleurs prévu l’intégration du Palau Sant Jordi pour les compétitions de patinage artistique et de patinage de vitesse sur piste courte (short-track), au moyen d’un aménagement temporaire, comme ce fut le cas au moment de l’organisation des Mondiaux de natation en 2013 avec la pose d’une piscine éphémère.

Le Palais Municipal des Sports et le Vélodrome d’Horta furent également annoncés, tout comme le nouveau Palau Blaugrana et un Centre de patinage de vitesse, sans oublier aussi l’idée de bâtir un Village des Athlètes dans le secteur de la Marina del Prat Vermell.

Pour mener à bien ce projet, les porteurs de la candidature avaient à l’époque chiffré à 3,262 milliards d’euros un éventuel budget d’organisation.

Octavian Morariu à la tribune de la 135ème Session du CIO, le 10 janvier 2020 à Lausanne (Crédits – CIO / Christophe Moratal)

Dans la course aux Jeux de 2030, pilotée par la nouvelle Commission de Futur Hôte présidée par Octavian Morariu, Pyrénées-Barcelone devrait être confronté à la vive concurrence de Salt Lake City (Utah, États-Unis) qui fait figure de grande favorite, avec moult arguments, allant de l’intérêt de la Ville Organisatrice des JO 2002 exprimé depuis près de 10 ans, les infrastructures de classe mondiale, le soutien institutionnel et l’engouement populaire.

Ville Hôte en 2010, Vancouver (Canada) pourrait aussi être une redoutable adversaire, à condition toutefois que les pouvoirs publics s’engagent pleinement pour promouvoir le projet.

Parmi les autres pistes à travers le monde, une candidature de Sapporo (Japon) a été envisagée, mais le contexte actuel au « Pays du Soleil Levant » pourrait in fine rebattre les cartes des priorités aux yeux des décisionnaires institutionnels et sportifs, et mettre en conséquence un terme à l’ambition de la Ville Organisatrice des Jeux d’hiver 1972.

En Europe, l’Ukraine – avec ou sans alliance – pourrait aussi être de la partie et ce, après le retrait contraint de Lviv de la course aux Jeux de 2022.

Quoiqu’il en soit, les nouvelles modalités de candidature offertes par le CIO et le dialogue constant voulu par ce dernier vis-à-vis des territoires potentiellement intéressés, ne figent pas un calendrier.

De fait, aucune échéance n’est pour l’heure mentionnée concernant l’attribution de l’édition 2030, les villes et régions pouvant postuler pour ladite édition tout en gardant un œil avisé sur les échéances futures, 2034 et 2038, en fonction de l’état d’avancement de leurs projets respectifs et des discussions engagées avec l’institution olympique.

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