Airbnb : Le CIO face aux tourments français

Emboîtant le pas à la Maire de Paris, Anne Hidalgo, qui avait soulevé des craintes après l’annonce d’un partenariat majeur entre le Comité International Olympique (CIO) et la plateforme de location d’hébergements Airbnb, l’Union des Métiers et des Industries de l’Hôtellerie (UMIH) a vivement critiqué ce mercredi la signature de ce même accord.

Dans un communiqué publié en marge du 67ème Congrès de l’UMIH à Biarritz, la structure va jusqu’à évoquer la moralité de ce partenariat olympique, parlant coup sur coup d’un accord « inopportun » et « outrageux ».

Joe Gebbia, co-fondateur de la plateforme « Airbnb » et Thomas Bach, Président du Comité International Olympique (Crédits – CIO / Greg Martin)

Mais à l’instar de la Maire de Paris, l’UMIH semble négliger le fait que la signature du partenariat entre le CIO et Airbnb ne concerne pas spécifiquement la tenue des Jeux de Paris 2024.

Pour rappel en effet, Airbnb est devenu le nouveau Partenaire Olympique Mondial – rejoignant notamment des entreprises comme Coca-Cola, Atos ou encore Alibaba – et ce jusqu’en 2028, soit durant neuf années et cinq Olympiades : Tokyo 2020, Pékin 2022, Paris 2024, Milan-Cortina 2026 et Los Angeles 2028.

Dès lors, sauf à imaginer une levée de bouclier unanime des professionnels du secteur de l’hôtellerie dans les cinq territoires précités, l’accord signé cette semaine entre les deux entités a peu de chance d’être remis en cause, pour ne pas dire aucune.

La pression exercée par Anne Hidalgo hier et l’UMIH aujourd’hui – qui va jusqu’à menacer la pérennité des contrats signés durant la phase de candidature de Paris 2024 – n’aura que pour seul effet que de mettre le Comité d’Organisation des Jeux de 2024 (COJO) dans un embarras certain, vis-à-vis du CIO d’une part et de potentiels futurs partenaires d’autre part.

Si le CIO a consenti à des ajustements au cours des dernières années pour recréer les conditions de candidatures multiples et pour éloigner durablement le spectre d’une échéance sans postulant, il n’est certainement pas prêt à revoir aujourd’hui sa stratégie dans le domaine du marketing.

De fait, en plus d’être propriétaire exclusif des Jeux Olympiques selon les termes fixés par la Charte Olympique (Règle 7.2) et le Contrat Ville Hôte, le CIO dispose d’une prérogative majeure qui est celle de pouvoir signer des partenariats mondiaux selon son bon vouloir. Les Hôtes des Jeux peuvent quant à eux contracter des partenariats nationaux au regard de leur propre attente ou ambition – éco-responsabilité pour Paris 2024 – mais en se conformant toutefois à la réglementation olympique en vigueur.

Pour justifier de cette mainmise, qui s’accompagne par la suite d’une redistribution des revenus olympiques entre les parties sportives, le CIO expose explicitement sur ses documents officiels que :

Le soutien apporté par les entreprises est indispensable au bon déroulement des Jeux et au fonctionnement de toutes les organisations membres du Mouvement Olympique (financement, services techniques, produits, etc.).

Présentation de l’emblème des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024, lundi 21 octobre 2019 (Crédits – Philippe Millereau / KMSP / Paris 2024)

Quoiqu’il en soit, dans la perspective des JO 2024, les interventions des uns et des autres sur un sujet aussi important que le partenariat olympique est clairement de nature à créer des tensions susceptibles de freiner l’investissement de possibles acteurs privés à destination de Paris 2024.

Un constat et des craintes légitimes pour le COJO qui désire réunir au moins 1,2 milliard d’euros de revenus à partir de son Programme des Sponsors.

Au-delà de la seule question des Jeux néanmoins, l’épisode Airbnb montre surtout l’incapacité de la France à sortir de débats internes symptomatiques d’une difficulté à s’adapter – et à adapter son économie – aux innovations de notre temps et aux nouveaux modes de consommation.

A l’heure où Tokyo 2020 prépare l’arrivée massive de la 5G pour la téléphonie mobile et de la technologie 8K pour les téléviseurs et alors que Los Angeles 2028 prépare des Jeux spectaculaires sur le plan de l’innovation, il ne faudrait pas que Paris 2024 soit perçu comme étant déjà en retard avant même d’avoir offert sa prestation aux yeux du monde.

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