Paris 2024 : L’organisation des Jeux face au risque d’une crue centennale de la Seine

Au cours des derniers jours, et encore actuellement, les services de la Ville de Paris et de la Région Île-de-France ont été particulièrement mobilisés face à la crue de la Seine et de ses affluents. Cette dernière, bien qu’elle n’ait pas atteint le seuil enregistré en 2016, soit 6,10 mètres, a néanmoins suscité l’extrême vigilance des autorités qui redoutent, comme à chaque montée des eaux, la survenance d’une crue centennale similaire à celle qui avait dévasté Paris et sa région en 1910.

A cette époque, la capitale avait sérieusement été impacté, avec une montée des eaux record à 8,62 mètres au niveau du Pont d’Austerlitz et l’inondation massive du réseau du métro ainsi que des gares parisiennes. Si un tel événement venait à se produire aujourd’hui, les répercussions de la paralysie seraient désastreuses pour l’économie francilienne et même française.

Ainsi, selon une étude menée en 2016 par l’Organisation et de Coopération et de Développement Économique (OCDE), une crue centennale en région francilienne pourrait impacter 8 départements et pas moins de 5 millions d’habitants, dont 1,5 million directement touchés par des mesures de coupures d’électricité. Sur le plan économique, 400 000 emplois seraient menacés et les dégâts représenteraient une facture globale de 30 milliards d’euros, sans compter une réduction significative du Produit Intérieur Brut (PIB) de 0,1 à 3% en cumulé. En outre, le réseau des transports serait pour partie mis à l’arrêt. Comme le précise ainsi le Rapport de l’OCDE :

« Les transports publics pourraient être affectés sur une large portion avec près de 140 kilomètres du réseau de métro fermés préventivement sur 250.

Le réseau routier pourrait être bloqué en de nombreux points : les ponts traversant la Seine interdits à la circulation du fait de leur fragilisation rendraient impossible le passage de la rive droite à la rive gauche ».

Face à un tel scénario, les autorités se préparent, avec notamment la mobilisation de bassins de rétention en amont de la « Ville Lumière ». Mais lorsque ces bassins sont eux-aussi impactés par les intempéries et, in fine, par une montée des eaux, la protection de Paris n’est plus garantie.

Dès lors, la question se pose de savoir si la capitale serait en mesure d’assurer l’organisation de grands rassemblements en son sein, et en particulier, de compétitions sportives. Présents ce mercredi 31 janvier à l’Assemblée Nationale, Tony Estanguet et Étienne Thobois ont été interrogés par Pierre-Yves Bournazel sur l’incidence possible d’une crue sur les Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.

(Crédits – Capture d’écran Sport & Société / Vidéothèque de l’Assemblée Nationale)

L’ancien Délégué spécial en charge du projet de Paris 2024 auprès de la Présidente de la Région Île-de-France, et aujourd’hui Député de la 18ème circonscription de Paris, a ainsi demandé un éclairage quant à la prise en considération des risques de catastrophes naturelles. Cette demande – loin d’être anodine – s’explique par le concept même des Jeux et de leur célébration proposé par le Comité d’Organisation (COJO) de Paris 2024.

Comme cela fut martelé durant la phase de candidature, la tenue des Jeux à Paris permettrait de mettre le cœur de la ville au service de l’événement en créant, le long de la Seine et du Bassin de la Villette, les conditions optimales de célébration des compétitions.

Tony Estanguet, Président du COJO, a d’ailleurs rappelé cet engagement de campagne, devant les Députés membres du Groupe de Travail sur les Jeux de Paris 2024 :

« Bien évidemment, nous espérons que la crue centennale ne se produira pas en 2024.

Dans notre concept, nous avons prévu une zone de célébration le long de la Seine.

Dans un scénario optimiste, nous estimons qu’il s’agit d’un site merveilleux pour les spectateurs, un site qui a déjà été testé durant l’EURO 2016 de football et que l’on souhaite agrandir pour que les nations puissent se retrouver. Nous imaginons même l’installation de Maisons de supporters et de pays, le long de la Seine ».

Cette idée de célébration, véritable trait-d’union entre les sites de compétitions proposés dans la capitale et les sites en périphérie de Paris, se veut l’incarnation de la notion de partage qui a composé la candidature et le projet olympique et paralympique tricolore.

(Crédits – Paris 2024 / Ph.Guignard / Air Images / Populous / Luxigon)

Mais outre cette « fan-zone » gigantesque sur les bords de la Seine, Paris 2024 prévoit aussi la tenue de compétitions sur ou à proximité du fleuve.

Pour minimiser le risque d’une crue et surtout l’impact éventuel sur les Jeux, le COJO et les pouvoirs publics établiront au cours des prochaines années un plan de continuité de l’activité, assorti d’options quant aux déplacements d’épreuves le cas échéant.

Sur ce point, Étienne Thobois, Directeur Général du COJO, a pris soin de détailler la mise en œuvre d’un tel dispositif :

« Un plan de continuité de l’activité sera mis en place dans le cadre des préparatifs d’organisation des Jeux et ce, comme pour toute logique de management des risques. Nous listerons dès lors l’ensemble des risques potentiels et les crues y apparaitrons forcément.

Pour exemple, et sous le contrôle du Président du Comité d’Organisation de la Coupe du Monde de rugby 2007 [Bernard Lapasset, Président d’honneur du COJO de Paris 2024], nous avions le Stade de la Mosson à Montpellier qui était situé en zone inondable. Nous avions alors élaboré un plan B concret, avec une logique de tenue des matchs dans d’autres stades et une gestion de l’ensemble des données liées : billetterie, hospitalité, reports, etc…

Pour les Jeux, une étude plus détaillée sera réalisée, mais sur les sites sportifs, aucun ne se trouve en zone inondable, même si une difficulté existe concernant la nage dans la Seine pour la nage en eau vive et le triathlon.

Le pire n’étant jamais certain, nous espérons qu’en plein mois d’août, nous serons à l’abri de ce type d’événement ».

Bien que le Directeur du COJO ait annoncé l’absence de sites sportifs en zone inondable, la crise engendrée par une crue centennale de la Seine rendrait toutefois délicat, le maintien en l’état de certaines épreuves envisagées en bordure de Seine.

En effet, outre le quartier de Bercy où se situe l’AccorHotels Arena, plusieurs espaces du centre de Paris seraient sans doute difficilement accessibles en raison d’une grave inondation et de la paralysie des transports et des moyens de communication : le Grand Palais, proposé pour les épreuves de taekwondo et d’escrime, l’Esplanade des Invalides, prévu pour le tir-à-l’arc, mais également le Champ-de-Mars qui doit abriter en son sein, le tournoi de beach-volley.

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Si un tel scénario-catastrophe se rapproche aujourd’hui de la fiction, compte-tenu des aménagements logistiques réalisés en amont de Paris depuis 1910 et du fait que la période prévue pour les Jeux ne soit pas la plus propice à ce type d’événement, une crue majeure n’est pas à exclure complètement. La problématique fondamentale qui se pose dès lors est bien entendue celle du maintien pur et simple des Jeux dans pareil cas de figure.

Car ce ne serait pas Paris qui serait seule concernée, mais bien l’Île-de-France dans sa globalité, à commencer par le Département de la Seine-Saint-Denis.

Sur ce territoire, le projet de Paris 2024 a ainsi planifié l’aménagement du Village des Athlètes, dans un secteur directement bordé par la Seine : le quartier Pleyel de Saint-Denis et une partie de l’Île-Saint-Denis.

Visuel du Village des Athlètes de Paris 2024 dans le secteur de Pleyel-L’Île-Saint-Denis (Crédits – Paris 2024)

2 pensées

  1. On n’en finit jamais avec les alarmistes, bougons et autres oiseaux de mauvais augures. En 1910, la crue s’est terminée en mars. Les Jeux ont lieu en août. Et nous sommes un siècle plus tard.
    L’art et la manière d’être ridicule et de parler pour ne rien dire. Que le député Bournazel (qui ne connait rien au sport et en tous les cas n’en a jamais pratiqué un) s’occupe de choses plus sérieuses.

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