Paris 2024 : Ce que contient le projet de loi olympique et paralympique

A compter du 18 décembre prochain, l’Assemblée Nationale, puis le Sénat, examineront selon le principe de la procédure accélérée, le projet de loi olympique et paralympique concernant l’organisation des Jeux de Paris 2024.

Comme précisé dans le cadre d’un précédent article, cette procédure accélérée autorisée par la Constitution, revient à engager une seule lecture dans chacune des deux assemblées du Parlement. A l’issue de cette lecture, une Commission Mixte Paritaire (CMP) – composée à part égale de Députés et de Sénateurs – est convoquée afin d’aboutir à la rédaction d’un même texte. Le délai d’examen est par ailleurs réduit au minimum, entre le dépôt du texte et l’examen en séance publique, puis entre la publication du texte adopté par la CMP et la séance publique.

Récemment présenté par la Ministre des Sports, Laura Flessel, le projet de loi olympique et paralympique sera porté devant le Parlement par Aude Amadou, désignée hier matin en qualité de Rapporteur dudit projet de loi.

Cette dernière aura donc la responsabilité de présenté à ses collègues parlementaires les diverses dispositions compilées dans dix-huit articles qui concernent aussi bien la réglementation en matière d’environnement, d’urbanisme ou d’ordre public.

Concrètement, le projet de loi se compose de quatre Titres : le Titre I concerne les dispositions relatives au respect des engagements pris dans le cadre du Contrat Ville Hôte ; le Titre II se focalise sur les principes relatifs à l’aménagement du territoire en lien avec l’organisation des Jeux ; le Titre III ne se compose que d’un seul article concernant l’un des aspects de la sécurité de l’événement ; enfin, le Titre IV intègre les notions d’éthique et d’intégrité.

(Crédits – Capture d’écran / Sport & Société)
  • Présentation sommaire des dispositions du Titre I

Dans ce premier Titre, le Gouvernement a souhaité transcrire les modalités d’application du Contrat Ville Hôte signé, le 13 septembre dernier, par la Ville de Paris et par le Comité National Olympique et Sportif Français (CNOSF).

De fait, l’Article 1er précise que le Comité d’Organisation des Jeux (COJO), le Comité International Olympique (CIO) et le Comité International Paralympique (IPC) sont reconnus en qualité d’organisateurs des Jeux de la XXXIIIème Olympiade.

Mais outre cet Article de principe, ce sont davantage les Articles suivants qui permettent de mesurer l’étendue de l’application du Contrat Ville Hôte.

L’Article 2 prévoit ainsi une modification du Code du Sport – dans ses Articles L141-5 et L141-7 – afin d’y inclure le principe de propriété des emblèmes, du drapeau, de la devise, de l’hymne et du symbole, mais également du logo, de la mascotte, du slogan et des affiches des Jeux Olympiques et des Jeux Paralympiques.

Les Articles 3 et 4 du projet de loi s’intéressent pour leur part à la stratégique question du marketing, avec des dispositions dérogatoires à la réglementation française concernant la publicité dans l’espace public. Il est notamment prévu des dérogations en ce qui concerne les interdictions relatives à l’emplacement de la publicité, de même qu’en ce qui concerne les prescriptions réglementaires sur la densité, la surface et la hauteur de la publicité.

En outre, l’Article 4 précise dans son premier alinéa, que « la publicité faite au profit des partenaires de marketing olympique au sens du Contrat Ville Hôte peut être autorisée dans un périmètre de 500 mètres de distance de celui de chaque site lié à l’organisation et au déroulement des Jeux […] pendant une période comprise entre le trentième jour précédant celui de la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques 2024 et le quinzième jour suivant la cérémonie de clôture des Jeux Paralympiques 2024 ».

Par ailleurs, ce même Article 4 prévoit des dérogations pour l’affichage sur les monuments naturels et dans les sites et monuments classés. Néanmoins, l’alinéa 7 dudit Article précise que les publicités autorisées devront s’adapter et être optimisée pour assurer une réduction de leur impact environnemental et une insertion adéquate sur le plan architectural et paysager.

Concernant cette fois le principe de l’ordre public, l’Article 5 mentionne que « par dérogation à l’Article 2060 du Code civil, le Contrat Ville Hôte […] ainsi que les conventions d’exécution de ce contrat […] peuvent comporter des clauses compromissoires ».

Autrement dit, les parties au contrat peuvent recourir à l’arbitrage en cas de litige – conformément à la définition de l’Article 1442 du Code de procédure civile – et ainsi se soustraire aux tribunaux de l’ordre judiciaire français. Dans le cas présent, cela sous entend de fait l’intervention éventuelle du Tribunal Arbitral du Sport (TAS) siégeant à Lausanne (Suisse).

Cet Article 5 ainsi que les Articles 3 et 4 du projet de loi olympique et paralympique pourraient porter à débat au sein de l’hémicycle, certains élus – en particulier sur les rangs écologistes, communistes et de la France Insoumise – ayant sans doute des griefs à apporter, comme ce fut le cas d’ailleurs lors de l’examen des dérogations fiscales adoptées dans le cadre de l’organisation de l’EURO UEFA 2016 de football.

Visuel de l’implantation du Village Olympique et Paralympique de Paris 2024 (Crédits – Paris 2024 / Populous / Luxigon)
  • Présentation sommaire des dispositions du Titre II

Pour ce qui est du Titre II et de ses Articles, la volonté de célérité de la procédure administrative est particulièrement présente et ce, afin de se conformer aux délais mentionnés dans le Contrat Ville Hôte et destinés à permettre l’organisation des Jeux en 2024.

L’Article 6 prévoit ainsi une participation du public par voie électronique concernant les décisions ayant une incidence environnementale.

Ce moyen de participation, prévu à l’Article L123-19 du Code de l’environnement, concerne notamment les « projets qui font l’objet d’une évaluation environnementale et qui sont exemptés d’enquête publique en application de 1° du I de l’Article L123-2« .

Outre le Code de l’environnement, le Code de l’urbanisme est également évoqué dans le projet de loi olympique et paralympique.

L’Article 7 précise ainsi que les installations temporaires liées à l’accueil des Jeux de 2024 sont dispensées de toute formalité et ce, en application de l’Article L421-5 du Code de l’urbanisme portant sur des équipements de faible importance ou dont l’installation est de faible durée.

Les Articles 8 et 9 font quant à eux mentions de procédures particulières applicables dans le cadre de l’aménagement du territoire.

Si le principe de la déclaration d’utilité publique reste essentiel, la procédure d’extrême urgence – autrement dénommée procédure d’expropriation pour cause d’utilité publique – est immanquablement présente.

De fait, l’Article 9 mentionne que la procédure peut être appliquée « en vue de la prise de possession immédiate, par le bénéficiaire de la déclaration d’utilité publique, de tous immeubles non bâtis ou bâtis dont l’acquisition est nécessaire à la construction du Village Olympique et Paralympique, du Centre Aquatique Olympique, du pôle des médias de Dugny-Le Bourget et du site d’équitation de Versailles prévus pour les Jeux ».

Il n’est en revanche pas fait mention du projet de Bercy Arena II. Si la localisation de cet arène multifonctionnelle pourrait in fine évoluer par rapport aux prévisions du dossier de candidature de Paris 2024 – vers la Halle Carpentier ou le Colisée du Tremblay-en-Francela construction est cependant prévue indépendamment des Jeux par la Ville de Paris.

Les Zones d’Aménagement Concerté (ZAC) prévus pour le Village des Athlètes, le Village des Médias et le cas échéant, pour le Village des Athlètes à Marseille, font quant à elles l’objet de l’Article 10 qui évoque l’insertion d’un alinéa complémentaire à l’Article L311-1 du Code de l’Urbanisme relatif à l’édification et au périmètre des ZAC.

Le choix de créer des ZAC pour les trois sites mentionnés répond à une exigence de reconversion post-Jeux et d’utilisation optimale par les acteurs parties prenantes au projet. Pour rappel, selon les projections de Paris 2024, le Village Olympique et Paralympique laissera en héritage un ensemble immobilier de 2 200 logements familiaux, 900 logements étudiants, 2 hôtel, de même que 10 hectares d’espaces verts pour le territoire de Pleyel-L’Île-Saint-Denis.

Dans la lignée des Articles 3 et 4 précédemment exposés, l’Article 11 concerne également la problématique du marketing olympique. Plus précisément, il est ici question de l’occupation de dépendances du domaine public.

L’Article 11 expose ainsi que « l’Article L2122-1-1 du Code général de la propriété des personnes publiques n’est pas applicable lorsque le titre portant sur des dépendances du domaine public dédiées aux Jeux Olympiques et Paralympiques est délivré au Comité d’Organisation […] ou lorsque ce dernier délivre des titres de sous-occupation sur ces mêmes dépendances aux partenaires de marketing olympique au sens du Contrat de Ville Hôte ».

Les deux Articles suivants du projet de loi olympique et paralympique évoquent pour leur part la problématique du logements dans le cadre des Jeux, et plus spécifiquement l’hébergement des personnes accréditées.

Au même titre que d’autres points énumérés au-dessus, les Articles 12 et 13 pourraient être contestés par une frange de parlementaires au regard de la méthode et des modalités de mise en œuvre.

L’Article 12 précise notamment que « les organismes [compétents] peuvent […] acquérir ou construire des locaux, à usage d’habitation ou non, dans les départements de Seine-Saint-Denis et des Bouches-du-Rhône afin de les mettre temporairement à disposition du Comité d’Organisation des Jeux […] pendant la durée de cette manifestation ».

L’Article 13 va plus loin dans le besoin d’obtenir des logements utiles aux personnes accréditées pendant l’événement olympique et paralympique.

Il est ainsi exposé que « dans les départements de la région Île-de-France, des Alpes-Maritimes, des Bouches-du-Rhône, de la Gironde, de Haute-Garonne, de la Loire, de la Loire-Atlantique, du Nord et du Rhône, les logements destinés à des étudiants […] et vacants au 1er juillet 2024 peuvent, à titre dérogatoire et au plus tard jusqu’au 1er octobre 2024, être loués, meublés ou non, au Comité d’Organisation […] en vue d’accueillir des personnes accréditées par le Comité International Olympique et le Comité International Paralympique durant les Jeux ».

La liste des départements susmentionnés peut prêter à interrogation quant à leur nombre. Toutefois, et à juste titre, la liste ne se limite pas à la seule région Île-de-France, compte-tenu du dispositif olympique et paralympique, avec l’intégration de neuf villes françaises pour la tenue du tournoi de football, et le choix de la ville de Marseille pour l’organisation des épreuves de voile.

Visuel du Centre Aquatique près du Stade de France (Crédits – Paris 2024 / Populous / Luxigon)
  • Présentation sommaire des dispositions du Titre III

Pour ce Titre, un seul Article – le 14 – a été proposé et se limite à un point relatif à la sécurité des Jeux.

Cet Article 14 concerne ainsi la création temporaire de voies spécifiques de circulation.

Habituellement symbolisées dans la Ville Hôte par le traçage au sol des anneaux olympiques, ces voies réservées doivent permettre, et surtout faciliter, la circulation des véhicules des services de secours et de sécurité, et des personnes accréditées, au premier rang desquelles les athlètes.

Tony Estanguet, coprésident de Paris 2024, et Anne Hidalgo, Maire de Paris, sur le stand de la Ville de Paris lors de la Convention SportAccord 2017 (Crédits – Sport & Société)
  • Présentation sommaire des dispositions du Titre IV

Les quatre points énoncés dans ce Titre – le dernier du projet de loi – revêtent une importance particulière au sens où ils concernent spécifiquement les notions d’éthique et d’intégrité.

L’Article 15 tout d’abord, renvoie à un renforcement par ordonnance de la procédure applicable pour permettre la prononciation de sanctions de la part de l’Agence Française de Lutte contre le Dopage. La nécessité de poursuivre la transposition en droit interne des principes du Code mondial antidopage est également abordé dans le présent Article.

Le Gouvernement sera autorisé – à l’issue de la publication de la loi olympique et paralympique – à prendre par voie d’ordonnance les mesures utiles à l’adoption des nouvelles règles et ce, dans un délai d’un an.

L’Article 16 ensuite, propose une amélioration et une simplification de la définition de délit de corruption sportive telle qu’énoncée dans le cadre de l’Article 445-1-1 du Code pénal. Le degré des sanctions restera néanmoins inchangé, à savoir cinq ans d’emprisonnement et une amende de 500 000 euros dont le montant pourra être potentiellement doublé.

L’Article 17 pour poursuivre, précise les contours relatifs à la déclaration de situation patrimoniale et à la déclaration d’intérêts que le Président du COJO – Tony Estanguet – et les responsables ayant délégation de pouvoir ou de signature, devront transmettre à la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique.

Sur le modèle des dispositions prévues pour les élus, les personnalités dirigeantes du Comité d’Organisation devront en effet communiquer dans les plus brefs délais les données patrimoniales.

Les alinéas 2 et 3 de l’Article 17 précisent en outre que « toute modification substantielle de la situation patrimoniale ou des intérêts [au cours de l’exercice des fonctions] donne lieu, dans un délai de deux mois, à une déclaration dans les mêmes formes.

Les personnes mentionnées […] adressent au Président de la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique une nouvelle déclaration de situation patrimoniale dans les deux mois suivant l’expiration de leurs fonctions ».

L’Article 18 enfin, énonce la compétence de la Cour des Comptes pour le contrôle des comptes et de la gestion des personnes morales de droit privé qui bénéficient de financements publics, ainsi que des personnes morales de droit public, qui participent à l’organisation des Jeux de 2024.

(Crédits – Paris 2024 / Jean-Marie Hervio / KMSP)

Composé in fine de dix huit Articles, le projet de loi olympique et paralympique devrait certainement susciter des critiques de la part d’une partie des parlementaires et ce, même si son adoption ne fait aucun doute, la majorité des élus étant en soutien de Paris 2024 et des objectifs fixés.

Pour le Gouvernement, l’adoption de la loi et sa publication, doivent intervenir au cours du premier trimestre de l’année 2018.

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