Le CIO engage une réflexion sur l’attribution des JO 2024 et 2028

A l’approche des visites de la Commission d’évaluation à Los Angeles (États-Unis) et Paris (France), l’idée d’une élection conjointe de la Ville Organisatrice des Jeux de 2024 et de 2028 revient sur le devant de la scène olympique.

Ce vendredi, une réunion de la Commission exécutive du Comité International Olympique (CIO) va ainsi acter la mise en place d’un Groupe de travail piloté par les quatre vice-Présidents de l’institution de Lausanne (Suisse) : John Coates, membre du CIO pour l’Australie ; Zaiqing Yu, membre pour la Chine ; Juan Antonio Samaranch Jr, membre pour l’Espagne et fils de l’emblématique ancien Président (1981-2001) ; et Ugur Erdener, membre pour la Turquie et membre de la Commission d’évaluation des Villes Candidates pour 2024.

Ce Groupe de travail examinera dès lors les modalités relatives à l’instauration d’une double élection, le 13 septembre prochain.

Un rapport sera d’ailleurs présenté lors la réunion des 11 et 12 juillet au siège du CIO, réunion au cours de laquelle les deux Villes Candidates doivent présenter leur projet respectif devant les membres de l’institution et les représentants des Fédérations Internationales (FI).

La Commission exécutive réunie autour du Président du CIO, le 17 mars 2017 (Crédits – IOC / Greg Martin)

Si l’institution décide à ce moment-là de modifier la procédure en cours, les dernières semaines avant le scrutin seront – à n’en pas douter – déterminantes, d’autant plus que ni Los Angeles, ni Paris n’ont jusqu’à présent démontrer un intérêt particulier au-delà de la seule et unique échéance de 2024.

Évidemment, si l’une des deux venait – d’ici le mois de juillet et encore davantage d’ici septembre – à évoquer publiquement la possibilité de se « contenter » de 2028, cela signerait immanquablement la fin de ses ambitions olympiques et paralympiques pour 2024.

A plusieurs reprises, des observateurs se sont fait l’écho d’une attribution 2024 pour Paris et 2028 pour Los Angeles.

Pour Paris, la date n’aurait rien d’un hasard puisqu’elle coïnciderait avec le Centenaire des derniers Jeux d’été organisés en France. Pour Los Angeles, la perspective de devoir attendre 2028 aurait le mérite de permettre la réalisation d’une plus grande part des travaux relatifs aux transports – un domaine qui demeure une faiblesse de la « Cité des Anges » – et d’envisager de futures négociations entre le Mouvement Olympique et de potentiels sponsors américains.

Pour le CIO, l’attribution des deux Olympiades à de telles Villes Hôtes aurait l’avantage d’assurer une certaine sécurité au Mouvement Olympique.

Qu’il s’agisse de Los Angeles ou Paris, chacune de ces villes dispose en effet d’une riche expérience dans l’organisation des Jeux – 1932 et 1984 pour la première et 1900 et 1924 pour la seconde – et de grands événements sportifs et culturels.

Ce double choix stratégique laisserait dès lors le temps nécessaire au CIO pour réformer durablement et en profondeur un processus qui selon les propos formulés il y a peu par Thomas Bach, « produit trop de perdants ».

Il faut dire que la campagne pour l’élection de la Ville Hôte des JO 2024 s’est rapidement apparentée à une véritable hécatombe.

L’abandon de Boston (États-Unis) avait constitué les prémices d’une lente chute – ou agonie – qui s’était poursuivie avec le retrait de Hambourg (Allemagne) face à la fronde populaire, puis de Rome (Italie) face au désengagement politique, et enfin de Budapest (Hongrie) sous la pression à la fois populaire et politique à un an d’une échéance électorale – les élections législatives – cruciale pour le parti du Premier Ministre, Viktor Orban.

La réflexion qui débutera dès aujourd’hui au sein du Mouvement Olympique pourrait ne pas conduire à une révision – dans l’immédiat – de la Charte Olympique. Seul le Contrat Ville Hôte pourrait exiger l’apport de clauses spécifiques.

La Règle 33 de ladite Charte mentionne ainsi que :

« 1. L’élection de toute Ville Hôte est la prérogative de la Session.

2. La Commission exécutive du CIO détermine la procédure à suivre jusqu’à ce que l’élection par la Session ait lieu. Sauf circonstances exceptionnelles, cette élection a lieu sept ans avant la célébration des Jeux Olympiques […] ».

Si l’on se penche sur les dispositions actuelles, la marge d’interprétation devrait donc permettre au CIO de procéder à une double attribution lors de la 130ème Session qui aura lieu en septembre à Lima (Pérou).

La Charte Olympique est le texte de référence du Mouvement Olympique concernant la gouvernance, l’attribution et l’organisation des Jeux (Crédits – Sport & Société / Capture d’écran)

A l’heure actuelle, les villes intéressées par l’Olympiade de 2028 ne se bousculent pas au portillon de départ. Hormis Brisbane (Australie), aucune autre candidature potentielle n’a fait l’objet d’une réflexion approfondie.

La Chine avec Shanghai pourrait éventuellement se positionner, bien qu’elle soit engagée dans les préparatifs organisationnels des JO d’hiver de Pékin 2022 et que les trois prochaines éditions des Jeux se dérouleront sur le continent asiatique. Quant à l’Afrique du Sud, un intérêt avant 2032 semble aujourd’hui à écarter, compte-tenu du récent retrait des Jeux du Commonwealth à Durban et des hésitations répétées pour 2020 et 2024.

Reste alors le Qatar ou Dubaï, même si les contraintes logistiques et météorologiques constituent un frein durable, voire l’Amérique du Sud. Néanmoins, les difficultés rencontrées par Rio de Janeiro (Brésil) pour l’organisation des Jeux d’été de 2016 devraient refroidir tout à la fois le CIO et d’éventuelles candidatures en provenance du Pérou ou de l’Argentine. Pour ces deux pays, la perspective de 2032 semble toutefois plus judicieuse.

Concernant enfin l’Europe, il n’est pas envisageable – à ce stade – de concevoir une ou plusieurs candidature(s).

Les échecs successifs de Madrid (Espagne) pour les JO 2012, 2016 et 2020 et le rapport de force politique local ne plaident pas pour une candidature ibérique. Il devrait en être de même pour l’Italie au cours des années à venir, ainsi que pour la Hongrie malgré l’Appel formulé par des sportifs hongrois.

La Turquie pour sa part pourrait chercher à se relancer avec une énième tentative d’Istanbul. Le contexte politique et les tensions diplomatiques récurrentes du côté d’Ankara pourraient cependant rendre caduque la moindre entreprise olympique.

Seule l’Allemagne semble donc en mesure de pouvoir proposer un projet pertinent mais là-encore, les échecs passés (Berlin 2000, Leipzig 2012, Munich 2018, Munich 2022, Hambourg 2024) devraient freiner l’enthousiasme des partisans les plus farouches.

Vue de la Salle de Présentation et d’Annonce des Villes Candidates et de la Ville Hôte des Jeux (Crédits – CIO / Ubald Rutar)

Les circonstances sont donc suffisamment « exceptionnelles » pour aboutir à une telle démarche avec le principe d’une double attribution.

Pour rappel, dans le cadre de la procédure d’attribution des Jeux d’été, le CIO n’a jamais été confronté à une crise ouverte de cette ampleur depuis le milieu des années 1980.

Pour l’Olympiade 1984, Los Angeles fut l’unique Ville Candidate, tandis que pour l’Olympiade suivante, seules Séoul (Corée du Sud) et Nagoya (Japon) avaient fait acte de candidature.

19 pensées

  1. Une double attribution permettra de répondre au maque de candidature au vu de la situation actuelle. Cependant, les pays qui souhaitent s’engager dans la course pour 2028 pourrait ne pas apprécier et se sentir lésé. D’autant que cette double attribution fait changer les règles en cour de route.

    1. Oui et c’est pour cela que Coates pour l’Australie et Erdener pour la Turquie en sont les plus farouches opposants.

      Maintenant, et c’est là tout le problème, si rien ne change, à savoir que l’on ne choisit qu’une seule ville, et que finalement les villes désirantes se présenter pour 2028 comme Brisbane ou Istanbul ne se présentent pas pour différentes raisons; que fera le CIO .

      Tout le monde c’est très bien que Paris ne veuille plus tenter sa chance. L.À ne voudra pas se risquer une nouvelle fois (même si je pense que la cité des anges en a les moyens). Le CIO en sera le grand perdant et son avenir très incertain.

      Ils ne pourront pas se résoudre éternellement à offrir les jeux à l’Asie ou à la Russie. Voir une nouvelle fois la Chine pour 2028 ou 2032 (après 2008, 2014 et 2022), ne fera pas bonne impression, au même titre que les États-Unis ou l’Europe dans le passé.

      Ils n’ont plus autant le choix, et de tous refuser, car à force de croire tout contrôler, ils risqueront d’enterrer définitivement cette compétition qui n’aura plus lieu d’exister, faute de « vrai » candidatures. (J’exagère peut-être) mais plus rien de ne devient impossible maintenant.

      Que pense tu de toute cette affaire Kévin ?

      1. Pourquoi ne pas envisager la Russie ou un ex pays soviétique /est européen ? Ceux ci voudront certainement rentabiliser leurs infrastructures nouvellement construites comme les stades de la Coupe du Monde 2018 de foot, et Jeux Europeens comme Bakou ou Tbilissi. Ils ont des moyens considérables pour construire ce qui manque et n’auront aucun besoin de demander l’avis du public.

      2. C’est une option à envisager effectivement, comme par exemple l’Azerbaïdjan.

        J’ai d’ailleurs consacré plusieurs articles déjà sur ce pays et d’autres concernant les échéances 2028, 2032, voire même 2036.

  2. N’est-ce pas plutôt le jeu pour LA2024 ?
    Le CIO sait qu’il n’arrivera pas à contenir la puissance américaine (sponsors, TV, …) mais il ne veut pas que Paris reparte avec une nouvelle défaite synonyme de fin définitive. Là le CIO ferait plaisir à LA tout en gardant Paris pour l’échéance 2028.

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