JO 2024 / Interview : « Le Havre, c’est le port du Grand Paris » (Édouard Philippe)

Récemment, la Ville du Havre (Seine-Maritime) a déposé sa candidature auprès des instances sportives françaises, afin d’intégrer le projet olympique de Paris 2024 en qualité de site potentiel pour l’accueil des épreuves de voile.

La cité dispose d’atouts incontestables, d’une localisation adéquate à quelques encablures de la capitale, ainsi que d’un soutien populaire et politique massif.

Aujourd’hui, le Député-Maire du Havre, Édouard Philippe (Les Républicains), a accepté de répondre en exclusivité aux questions de Sport & Société.

Édouard Philippe, Maire du Havre (Crédits - Eric Houri)
Édouard Philippe, Maire du Havre (Crédits – Eric Houri)

– Dans le cadre de la candidature de Paris à l’organisation des Jeux d’été de 2024, la Ville du Havre a décidé de présenter sa candidature pour obtenir, le cas échéant, les épreuves de voile. Quels sont les principaux atouts du territoire havrais ?

C’est d’abord un lieu privilégié. Avec son port de plaisance en eaux profondes qui est un des rares de la région à accueillir les bateaux 24 heures sur 24 et par tous les temps, Le Havre est une des plus grandes villes nautiques de France et la première en nombre de licenciés de voile. Il est vrai que nous avons décidé depuis longtemps de miser sur cette identité avec la création de Port 2000, avec la mise en place d’un plan de développement du nautisme en 2008, avec l’amélioration de l’offre portuaire et l’augmentation des anneaux disponibles. J’ajoute que son plan d’eau correspond parfaitement au cahier des charges des JO…

Le Havre a une vocation internationale et est tournée vers le large depuis toujours. Le Havre est l’indispensable lien maritime de Paris dans le commerce mondial. Le Havre, c’est le port du Grand Paris.

C’est une ville qui a l’habitude des grands événements médiatiques : elle a accueilli en 2010 le départ de la Solitaire du Figaro. Elle accueille tous les deux ans, depuis 1993, le départ de la Transat Jacques Vabre et ses 300 000 visiteurs. Et chaque année depuis 2006, la Normandy Sailing Week y est organisée pendant 4 jours.

C’est enfin un héritage, et une tradition olympique !

Je ne parle pas seulement des attaches normandes de Pierre de Coubertin, qui avait d’ailleurs tenu à ce que ce soit notre ville qui accueille le deuxième Congrès du Comité International Olympique (CIO) en 1897. Mais c’est au Havre, en 1838, qu’a été fondé le plus ancien yacht club d’Europe continentale, la Société des Régates du Havre ; c’est au Havre, en 1840, qu’ont été organisées les premières régates françaises. C’est au Havre, enfin, que se sont déroulées les épreuves nautiques des Jeux Olympiques d’été de 1900 et de 1924.

Toutes ces raisons suffiraient à légitimer notre candidature.

Mais nous voulons surtout la concevoir avec Paris et avec le Mouvement sportif. Un dossier de candidature, c’est une aventure commune. Le Havre se veut un atout pour la voile, et c’est tout le travail que nous menons avec la Ligue de Voile pour mettre sur pieds un plan de développement ambitieux pour ce sport. Et Le Havre se conçoit comme une valeur ajoutée à la candidature de Paris 2024.

Cette candidature sera celle du Grand Paris, l’étude d’opportunité publiée en février dernier l’a clairement démontré. Elle doit servir aussi à conforter la métropole parisienne et la renforcer par rapport à ses concurrentes mondiales. Le projet cohérent est celui qui fédère tous les territoires concernés par le Grand Paris, dont l’Axe Seine et son débouché maritime naturel : l’Estuaire de la Seine et Le Havre.

– Quels seraient les investissements financiers et matériels nécessaires pour mettre le site candidat aux normes olympiques ?

Nous devons imaginer plusieurs lieux, avec une marina olympique, un village pouvant accueillir plus de 400 sportifs dans des conditions idéales, une zone spectateurs et un ‘live site’ qui permette de vivre les épreuves de voile dans leur intégralité.

Nous concevons notre dossier à partir de projets en préparation. A l’horizon 2020, plusieurs espaces du centre-ville doivent être réhabilités et réaménagés. Nous nous appuyons sur ces zones. Notre candidature est donc un accélérateur de projets.

L’essentiel des sites olympiques seront durables et s’inscrivent dans notre projet de développement urbain. Chaque euro investit sera bénéfique aux Havrais et chaque site a vocation à une nouvelle vie après les Jeux. Seul le ‘live site’ sera événementiel.

– L’organisation d’épreuves olympiques représente un défi logistique majeur, mais aussi une chance pour le territoire-hôte. En quoi l’accueil des épreuves de voile de Paris 2024 peut-elle être un tremplin pour le développement du Havre ? Quelles seraient les retombées économiques, sociales et urbaines pour la ville, l’agglomération et la région ?

Il y aurait des retombées évidentes : la visibilité accrue ou l’afflux de visiteurs dans les commerces, restaurants et hôtels du Havre et de Normandie. On a bien vu la réalité de cet impact avec les Jeux Équestres Mondiaux 2014. Il a été évalué à 102 millions d’euros de retombées économiques, dont 55 millions d’euros pour la seule ville de Caen.

C’est aussi un facteur considérable de dynamisation urbaine et cela ne pourrait que favoriser l’action que nous menons en ce domaine, avec la rénovation notamment du centre-ville, avec ses bassins, et du front de mer.

Ce serait aussi l’occasion de valoriser les atouts du Havre – dont notre centre-ville classé au Patrimoine Mondial de l’UNESCO – et ceux de nos voisins : Deauville, Honfleur, Rouen, mais aussi ceux de la Normandie tout entière. La ‘marque’ Normandie est une de celles qui est connue dans le monde entier et notre cité, qui est la plus grande ville de la région, a la chance d’être située au cœur géographique d’une Normandie qui sera réunifiée dès le 1er janvier 2016.

– Quelles ont été les premières réactions des citoyens du Havre à l’annonce de la candidature ? Soutiennent-ils cette ‘ambition olympique’ ?

Une candidature qui ne serait qu’institutionnelle partirait avec un handicap.

Nous avons été soutenus d’emblée par le Mouvement sportif normand bien sûr, par les élus de toutes tendances politiques et de toute la région, mais aussi par les familles, les commerçants, les entreprises.

Il y a une ‘fierté havraise’ qui s’est immédiatement fait jour et un début de mobilisation populaire autour de cette candidature qui s’exprime, notamment, sur les réseaux sociaux. Je crois que cette dynamique n’en est qu’à ses débuts !

– La Fédération Française de Voile et les instances chargées de la candidature olympique tricolore réceptionneront prochainement les différents projets et sélectionneront un site courant juillet. Quelles sont, selon vous et en toute objectivité, les chances du Havre de décrocher ce précieux sésame, surtout lorsque l’on connaît la concurrence déclarée (La Rochelle, Brest, Hyères, Marseille…) ?

Toutes ces villes sont d’excellentes candidates et des concurrents très sérieux ; toutes ont de bons plans d’eau, une expérience des événements nautiques, des acteurs sportifs dynamiques… Et toutes ces candidatures signifient une chose : la France est un grand pays de voile et de nautisme, et c’est extrêmement réjouissant !

Mais nous avons confiance parce que la nôtre est cohérente géographiquement, techniquement et symboliquement avec l’ambition du Grand Paris.

– Paris devrait se déclarer officiellement candidat dans les jours à venir. Quel regard portez-vous sur les villes d’ores et déjà candidates, à l’image de Boston (États-Unis), Hambourg (Allemagne) et Rome (Italie) ?

Les Américains, Allemands et Italiens présenteront, personne n’en doute, des dossiers techniquement impeccables.

Le choix pourrait donc bien se jouer sur les projets sportifs et territoriaux des différentes candidatures. Quelle est leur vision du sport ? Comment entendent-elles contribuer au développement de l’Olympisme, notamment à l’égard des plus jeunes ? Comment peuvent-elles faire des JO un moteur de changement pour les territoires qui les accueillent ?

Le Havre n’a qu’une envie : aider la candidature française à y répondre de la manière la plus innovante et efficace possible, faire gagner Paris et faire, enfin, revenir les Jeux en France en 2024 !

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