JO 2024 : Selon Bernard Lapasset, « nous avons aujourd’hui les outils nécessaires » pour réussir

Invités ce soir de l’émission télévisée Stade 2, Bernard Lapasset, Président de l’Association d’étude Ambition Olympique et Paralympique et Armand de Rendinger, consultant international et ancien directeur des relations internationales de Paris 2012 ont apporté leurs analyses concernant la candidature olympique pour 2024.

Après les échecs de Paris 1992, Paris 2008 et Paris 2012, la capitale française s’apprête à revenir dans l’arène olympique avec le ferme espoir de remporter la flamme des Jeux.

Encore faudra-t-il que les porteurs du projet retiennent les raisons des échecs passés, notamment en ce qui concerne la place des politiques dans le cadre d’une candidature.

Comme le martèle Alain Lunzenfichter, ancien rédacteur en chef du quotidien sportif « L’Équipe » et ex-Président de l’Association des Journalistes Olympiques, « les politiques n’ont pas compris qu’il faut se mettre en retrait et laisser les sportifs parler.

Ils sont toujours en train de mendier quelque chose, c’est-à-dire, ils veulent avoir les installations des Jeux dans leur ville, ils veulent leur part du gâteau.

Le Maire de Londres n’a jamais été dans une réception, il ne s’est pas mis devant, il s’est mis en arrière et cela n’a pas empêché la ville de gagner » l’organisation des Jeux de 2012.

Stade 2 - plateau

La question de la gouvernance et du leadership de la candidature tricolore devra donc être un élément tranché d’ici les prochaines semaines.

Selon toute vraisemblance, Bernard Lapasset et Tony Estanguet – triple Champion olympique et actuel membre du CIO – devraient porter ce projet.

Une nouveauté déjà, par rapport à Paris 2012 où la candidature avait été incarnée par le Maire de l’époque, Bertrand Delanoë mais aussi, bien que moins visibles, par Jean-Paul Huchon, Président de la Région Île-de-France et Jean-François Lamour, Ministre des Sports.

Pour Bernard Lapasset, « c’est une priorité, c’est une exigence que le Mouvement sportif porte le projet. Il ne faut pas rester dans un dispositif aussi éloigné que la réalité du CIO.

On a besoin d’athlètes, on a besoin d’acteurs du Mouvement sportif, unis, solidaires, qui portent le même message et qui ont la même stratégie. On a commencé depuis presque un an. On a travaillé autour de 12 ateliers, 250 personnes se sont associés à ce travail, avec 2 athlètes par ateliers, on a également essayé de faire une balance entre Olympique et Paralympique« .

Cette exigence d’une candidature portée par le Mouvement sportif est aussi souhaitée par Armand de Rendinger.

En janvier dernier, celui-ci indiquait dans une interview pour « Sport & Société », la nécessité de construire « une gouvernance sous la forme d’un commando à structure pyramidale, avec à sa tête un Président (si possible issu du monde sportif ou accepté par celui-ci) impliqué à 200%, assisté d’un directeur général ayant les pleins pouvoirs sur toutes les commissions de travail (pérennes et ponctuelles) ».

Sur le plateau de Stade 2, Armand de Rendinger a rejoint le propos de Bernard Lapasset et appuyé l’argument relatif à la présence au premier plan des sportifs.

« Il faut que les politiques soient derrières pour apporter leur soutien.

Mais qu’est-ce que l’on remarque aujourd’hui déjà ? On voit des déclarations dans tous les sens, de la Région, de la Maire… qui s’imposent éventuellement sur le dossier lui-même.

Le dossier doit être mené par les sportifs, c’est indispensable ».

Stade 2

Mais au-delà de la question du leadership, la problématique olympique – à savoir la connaissance du Mouvement olympique, son histoire et ses attentes – est également primordiale pour assurer le succès d’une candidature aux Jeux.

Pour Armand de Rendinger en effet, la technicité du dossier n’est plus un élément-clé.

« Chaque candidature, chaque ville, chaque pays a la possibilité d’organiser des Jeux parfaits.

La France, pas plus et pas moins que d’autres.

Nous, nous avons la capacité d’organisation, nous en avons fait la preuve, mais ce n’est plus du tout l’élément déterminant. L’élément déterminant, c’est d’écouter chaque membre du CIO, de voir ce qu’ils veulent ».

Préfigurant sans doute la stratégie qu’il compte développer et mettre en place pour la prochaine candidature olympique de Paris, Bernard Lapasset est revenu quant à lui sur la campagne victorieuse du rugby à sept pour intégrer le programme olympique dès les Jeux de Rio 2016.

Président de World Rugby (ex-International Rugby Board), Bernard Lapasset a été l’artisan principal de cette intégration au programme des JO et souhaite aujourd’hui mettre son expertise au service de Paris.

« Nous avons pris une agence britannique. Il fallait prendre des gens qui avaient déjà la référence telle que le CIO pouvait la comprendre et là-dessus, il fallait s’accompagner des meilleurs.

Derrière, nous avons pris un tour de table permanent pendant deux ans. Il fallait s’attacher à un contact vraiment individualisé et personnalisé. L’important, c’est de connaître les gens et d’établir une relation avec eux.

Ce n’est pas simplement de vendre un produit mais de partager ce que l’on veut apporter vis-à-vis d’eux, avec un partage pour un vote utile au service de la France ».

Cette stratégie – qui n’est pas sans rappeler celle mise en place par Jean-Claude Killy pour l’obtention des JO d’Albertville 1992 ou encore des Championnats du Monde de ski alpin 2009 à Val d’Isère – réside dans un pragmatisme certain comme le précise Armand de Rendinger.

Prenant l’exemple – décrié en France – de Tony Blair pour la candidature de Londres 2012, le consultant international rappelle que l’ancien Premier Ministre britannique « a été formé au départ par un certain nombre de personnes qui lui ont expliqué, ‘vous allez voir, Monsieur Blair, Monsieur le Premier Ministre, disons, 60 membres du CIO et à chacun des membres du CIO, vous allez tenir ce discours’.

Le discours qu’a donné Tony Blair à chaque membre du CIO a été spécifique. Il a été adapté à ce que voulait l’homme du CIO ».

Stade 2 - Lapasset

Une chose est en tous cas certaine. Pour la candidature de Paris 2024, il ne faudra pas retomber dans les travers de la nostalgie olympique, avec pour le cas présent, la référence au Centenaire des Jeux de Paris 1924.

En amont des Jeux de Sotchi 2014, Jean-Claude Killy – qui était encore membre du CIO et qui était le Président de la Commission de Coordination de ces JO – rappelait à juste titre le fait que « le CIO romantique n’existe plus ».

Une donnée qui semble avoir été intégrée par les porteurs du projet parisien, à commencer par Bernard Lapasset.

« Aujourd’hui, Paris n’est pas incontournable. Nous avons vraiment des capitales qui peuvent exprimer leur culture, leur histoire, leur produit.

Nous devons exprimer les éléments du futurs. Nous avons la chance, en France, d’avoir le plus fort taux de natalité des pays européens. Utilisons-le ! Qu’est-ce que nous voulons faire de nos enfants demain ?

On a besoin du Paris traditionnel et culturel, c’est important, car c’est la référence du Paris éternel. Mais sachons que ce n’est pas suffisant.

Nous avons besoin de donner un nouvel élan à Paris, à la conduite de la candidature. Trouvons des éléments qui permettent d’afficher clairement notre volonté. Nous avons travaillé et nous avons 5 ou 6 thèmes que nous avons aujourd’hui choisi mais nous n’en parlerons pas, car nous avons besoin de garder ces éléments confidentiels. Nous avons besoin de travailler sur ces sujets car ils peuvent être le signal de ce qui fera la différence de Paris.

Nous avons aujourd’hui les outils nécessaires, le recul par rapport à ce qui s’est passé. Nous avons un instrument de combat. Ce combat, nous allons le mener à l’amiable, nous allons le mener tranquillement s’il le faut, nous nous battrons sur des terrains difficiles aussi.

Aujourd’hui, il n’y a pas de candidature qui écrase les autres ».

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